Ne sautez pas
Frédéric Ernotte
Editions Lajouanie
Parution le 26/08/2016
Pages : 304
ISBN: 978-2-37047-0737
Prix : 19 €
Présentation de l'éditeur
Est-ce forcément mal de ne pas faire le bien ? Assis sur le toit d’un des plus hauts gratte-ciel de Bruxelles, Mathias est songeur. Les jambes du laveur de vitres balancent dans le vide à plus de cent mètres du sol.
Alors qu’il réfléchit au travail d’intérêt général que la justice lui a imposé (vendre en porte à porte des gadgets pour une association humanitaire), un homme paniqué surgit derrière lui. Mathias ne le sait pas encore, mais la minute qui va suivre va radicalement changer sa vie. Un engrenage impitoyable vient de s’enclencher…
Extraits
« Amende suivie d’un travail d’intérêt général… Je n’avais envie ni de balayer nos rues ni de repeindre des façades.
Inconsciemment, j’ai prononcé deux mots du bout des lèvres : une O N G ? »
***
« – Mais arrête avec tes s’il vous plaît et va te jeter sous une bagnole ! Tu crois quoi ? Que tu peux pleurnicher toute ta vie et poser ton cul sur un trottoir en attendant que les autres fassent tout pour toi ? Tu n’as pas d’autres rêves que d’être l’exemple à ne pas suivre et de tendre ton gobelet vide aux personnes qui te frôlent sans le vouloir ? »
***
« Je longe la corniche, enjambe le garde-fou et m’assieds face à l’étendue verte. Bruxelles la verdoyante. J’enfonce mes écouteurs et dégaine mon casse-croûte. Je mords dedans à pleines dents en balançant mes jambes dans le vide. J’aime cette sensation de liberté. »
Mon avis
Que j’étais impatiente de le lire celui-là. Faites comme
moi, sautez sur « Ne sautez pas », vous ne serez pas déçu.
Frédéric Ernotte est un jeune écrivain belge. Il nous
propose ici son second roman.
Le premier était sous le signe du polar, un vrai régal,
c’était « C’est dans la boîte » mon avis est ici
Celui-ci est différent. Son éditeur Lajouanie dont je vous reparle plus longuement bientôt le définit de façon claire "Roman pas
policier mais presque".
Mathias Van Rosten, la trentaine file depuis quatre ans le
parfait amour avec Elisa, infirmière. Il est laveur de vitres sur nacelle sur
de grands immeubles. Il aime son boulot qu’il fait en compagnie
d’Al, un vrai père pour lui.
Il aime conduire vite, ce qui lui a valu une condamnation à des travaux d'intérêt général. Son beau-frère Raph est toubib sans frontières, il fait du bien autour de lui. Alors, lors de sa condamnation il a suggéré au juge de faire sa peine pour une ONG. Résultat : il vend des figurines en plastique en porte à porte à leur profit.
Ce n'est pas simple tous les jours mais il fait de belles rencontres.
Entre-temps une réflexion lui est venue, ça le travaille : "Est ce que ne pas faire du bien, c'est mal ?" .
Il imagine avec sa copine des arnaques pour convaincre les gens et vendre plus de modules en plastique. Les discussions avec Raph son beau-frère lui ouvrent les yeux sur le travail des associations humanitaires...
Mais détrompez-vous ce n'est pas barbant, tout au contraire. Petit à petit sans s'en rendre compte notre esprit lui aussi finit par se mettre en marche, les questions et réflexions germeront petit à petit dans notre tête de lecteur, insidieusement comme ça naturellement...
Peut-on aider tout le monde ? être présent partout dans le monde ? Comment déterminer l'urgence ?
Ce récit que l'auteur situe dans la littérature blanche a la particularité d'être mené comme un thriller, jamais on ne s'ennuie, car on passe aussi à des réflexions sur les séries télés, les jeux télés que notre protagoniste imagine et invente.
C'est plein d'humour, de surprise. On passe avec beaucoup de brio et de légèreté du rire aux tensions, de l'anecdote à la vraie réflexion. Le personnage de Mathias est super bien construit tout comme l'histoire.
Une chose est certaine, Frédéric Ernotte nous emmène ailleurs avec beaucoup de fraîcheur, de vivacité, de jeux de mots. Impossible de lâcher ce bouquin car il y a un vrai rythme, une tension qui s'installe peu à peu et va grandissant et en fait un vrai page turner.
Je me suis régalée alors n'hésitez plus sautez sur "Ne sautez pas", excellent moment garanti. Une plume à suivre.
Un coup de ♥
Les jolies phrases
On n'a jamais le temps. Il faut le prendre et le dompter pour en faire un prisonnier docile.
Faut pas confondre l'intelligence et la culture générale. J'peux te dire que t'es un p'tit gars intelligent. Pas parce que tu sais me citer des villages en Afrique. Ça, c'est à la portée du premier touriste venu. Par contre, te dire que t'as intérêt à pouvoir les sortir au bon moment pour ne pas passer pour un con, ça, c'est intelligent.
J'vais te raconter une anecdote. J'avais un professeur de Français à l'école. Un acharné d'orthographe. Ça rigolait pas à l'époque, tu sais. On avait peur de faire des fautes. Aujourd'hui, pouah c'est un grand n'importe quoi ! Au lieu d'apprendre aux enfants à écrire, on change le dictionnaire en fonction de leurs fautes.
Je sais maintenant que la meilleure manière de tourner une page est de ne pas la lire à tout le monde.
Il y a une grande différence entre mentir et ne pas dire toute la vérité. L'honnêteté est parfois contre-productive.
La frontière entre une victoire et une défaite est finalement plus ténue qu'il n'y paraît.
C'est le problème quand on vit sur les nerfs. On ne voit pas les clignotants. On avance sur la réserve et seule la panne sèche peut nous faire prendre conscience que lever le pied est une option respectable. Ce n'est pas dans le marathon lui-même qu'on sent ses muscles brûler le plus, mais à la seconde à laquelle on s'arrête.
Qu'on le veuille ou non, la mort est une première de la classe. Une employée du mois. Une fonctionnaire un peu trop zélée. La mort est une droguée du travail. Un pion sans coeur qui décime l'échiquier sans scrupule. Sans se retourner. Sans se rendre compte des dégâts. Elle détruit des vies sans se préoccuper un quart de seconde de la haine qu'on lui voue. Elle est libre. Indomptable. Gourmande et insatiable. Elle est rebelle et elle nargue tous ceux qui se mettent en travers de sa route. La mort est cruelle. Ponctuelle. Elle fixe des rendez-vous qu'elle n'oublie jamais.
Je n'arrive pas à distinguer le bien du mal. Je suis persuadé d'avoir agi correctement et, en même temps, de terribles regrets se sont invités dans ma vie. L'insouciance me manque.
Les oiseaux se cachent peut-être pour mourir, mais pas les gens qui viennent de subir un tremblement de terre. Ils viennent crever devant toi en te suppliant de faire quelque chose pour les aider.
Il faut avoir la lucidité de partir avant de faire du mauvais travail.
L'horizon est bien plus lointain lorsqu'on ne pointe pas son nez en direction de ses chaussures.
Entraîner quelqu'un dans sa chute ne la rend pas moins douloureuse.
Nous ne pouvons pas aider tout le monde, mais tout le monde peut aider quelqu'un.
Les jolies phrases
On n'a jamais le temps. Il faut le prendre et le dompter pour en faire un prisonnier docile.
Faut pas confondre l'intelligence et la culture générale. J'peux te dire que t'es un p'tit gars intelligent. Pas parce que tu sais me citer des villages en Afrique. Ça, c'est à la portée du premier touriste venu. Par contre, te dire que t'as intérêt à pouvoir les sortir au bon moment pour ne pas passer pour un con, ça, c'est intelligent.
J'vais te raconter une anecdote. J'avais un professeur de Français à l'école. Un acharné d'orthographe. Ça rigolait pas à l'époque, tu sais. On avait peur de faire des fautes. Aujourd'hui, pouah c'est un grand n'importe quoi ! Au lieu d'apprendre aux enfants à écrire, on change le dictionnaire en fonction de leurs fautes.
Je sais maintenant que la meilleure manière de tourner une page est de ne pas la lire à tout le monde.
Il y a une grande différence entre mentir et ne pas dire toute la vérité. L'honnêteté est parfois contre-productive.
La frontière entre une victoire et une défaite est finalement plus ténue qu'il n'y paraît.
C'est le problème quand on vit sur les nerfs. On ne voit pas les clignotants. On avance sur la réserve et seule la panne sèche peut nous faire prendre conscience que lever le pied est une option respectable. Ce n'est pas dans le marathon lui-même qu'on sent ses muscles brûler le plus, mais à la seconde à laquelle on s'arrête.
Qu'on le veuille ou non, la mort est une première de la classe. Une employée du mois. Une fonctionnaire un peu trop zélée. La mort est une droguée du travail. Un pion sans coeur qui décime l'échiquier sans scrupule. Sans se retourner. Sans se rendre compte des dégâts. Elle détruit des vies sans se préoccuper un quart de seconde de la haine qu'on lui voue. Elle est libre. Indomptable. Gourmande et insatiable. Elle est rebelle et elle nargue tous ceux qui se mettent en travers de sa route. La mort est cruelle. Ponctuelle. Elle fixe des rendez-vous qu'elle n'oublie jamais.
Je n'arrive pas à distinguer le bien du mal. Je suis persuadé d'avoir agi correctement et, en même temps, de terribles regrets se sont invités dans ma vie. L'insouciance me manque.
Les oiseaux se cachent peut-être pour mourir, mais pas les gens qui viennent de subir un tremblement de terre. Ils viennent crever devant toi en te suppliant de faire quelque chose pour les aider.
Il faut avoir la lucidité de partir avant de faire du mauvais travail.
L'horizon est bien plus lointain lorsqu'on ne pointe pas son nez en direction de ses chaussures.
Entraîner quelqu'un dans sa chute ne la rend pas moins douloureuse.
Nous ne pouvons pas aider tout le monde, mais tout le monde peut aider quelqu'un.