Les dragons - Jérôme Colin ♥♥♥♥♥
Allary
Parution : le 24 août 2023
Pages : 192
ISBN : 978-2-37073-470-9
Prix : 18.90 €
Présentation de l'éditeur
Jérôme a quinze ans. Il est en colère contre ses parents qui sentent le vieux. Contre le monde qui le rejette. Contre les monstres qui l’empêchent de dormir. Contre lui surtout. Sur décision de justice, il est interné dans un centre de soins pour adolescents. Là, il rencontre les dragons, ces enfants détruits par leur famille, l’école ou l’époque. Parmi eux, il y a Colette. Crâne rasé, bras lacérés, noir sur les yeux. Elle veut mourir. Il veut l’embrasser. L’emmener loin d’ici.
Les Dragons est l’histoire d’un coup de foudre entre adolescents plus normaux qu’il n’y paraît.
Un cri d’amour pour ces enfants que notre société cache, mais qui disent tant de nous.
L'auteur
Jérôme Colin est journaliste à la RTBF où il anime « Entrez sans frapper » et « Hep Taxi ». Il est l’auteur de
Éviter les péages (Allary Éditions, 2015) et
Le Champ de bataille (Allary Éditions, 2018), adapté au théâtre et en cours d’adaptation au cinéma. Pour écrire
Les Dragons, il a fait une immersion de 4 mois dans un centre de soin psychiatrique pour adolescents âgés entre 12 et 18 ans.
Source : Allary éditions
©Crédit Photo : Ganaëlle Glume
Mon avis
Quelle claque ! Quel récit bouleversant ! Cela faisait vraiment très longtemps qu'un livre ne m'avait pas autant retournée. Je l'ai terminé les yeux embués, le coeur serré.
Merci Jérôme Colin de mettre en avant les dragons, ces jeunes en souffrance, sans espoir, pour qui notre société ne fait pas assez.
C'est un réel fait de société qui est mis en avant. Les dragons, ce sont les enfants détruits par la famille, par l'école ou par notre société dans laquelle ils ne se sentent pas à leur place.
Jérôme a 15 ans, il est en décrochage scolaire, violent avec son père, accro à l'alcool ou l'herbe pour s'évader. Il est interné dans un centre de soins pour adolescents, c'est là qu'il va rencontrer Colette, le crâne rasé, les bras lacérés, les yeux noirs. Il tombe instantanément amoureux, il veut l'aimer, l'embrasser... Colette, elle a presque 18 ans et elle ne veut qu'une chose, mourir.
Cette rencontre va changer sa vie et être à l'origine de ce récit, un cri d'amour.
Autour de lui, Jérôme voit la souffrance, tous souffrent comme lui qui le soir est assailli de ses démons, de la peur, ses cauchemars.
Il va découvrir le pouvoir des mots, de la littérature et surtout un livre qui va changer sa perception et le rapprocher de Colette ; "Les raisins de la colère" de Steinbeck. Il va découvrir la force des livres et de l'écriture qui permet de comprendre qu'il n'est pas seul, de se libérer.
"Donne toi pour mission de te frotter aux autres. C'est la seule façon de combattre ce monde qui ne te plaît pas".
Jérôme Colin décrit le mal-être, la souffrance, la dépression et le délire mélancolique. Il nous fait prendre conscience que grand nombre de jeunes se mutilent pour ne plus sentir leur mal-être et se demandent "Comment réparer le fait d'être né". C'est un vrai problème de société dont on ne parle pas assez. Trop de jeunes ne sont pas en phase avec notre société, ses règles de performance à l'école, au travail, le capitalisme qui prévaut, notre planète qui n'est pas respectée, ce qui n'offre aucun idéal pour la jeunesse.
Un livre poignant, qui retourne, dur quand on est parent mais tellement indispensable. L'écriture est fluide, c'est beau, tellement vrai.
A lire absolument.
Immense coup de coeur.
Les jolies phrases
Avoir un enfant, c'est accepter de vivre dans la peur pour le restant de tes jours.
Ecrire, c'est essayer de dire comment la vie vous affecte.
Aux enfants, ne pas dire arrête mais explique. Ne pas dire tais-toi mais raconte. Ne pas dire ne fais pas l'intéressant mais fais l'intéressant.
Donne toi pour mission de te frotter aux autres. C'est la seule façon de combattre ce monde qui ne te plaît pas.
Le viol est un assassinat. Sauf que le cadavre respire encore.
Je ne comprends pas comment il faut faire pour réparer le fait d'être né.
Parce qu'un enfant ne devient jamais exactement ce que tu espérais de lui. Ça pousse de travers ces choses-là.
Tu verras, ça n'existe pas la normalité. Tout le monde a des choses à réparer.
En m'ordonnant de m'en tenir à la place qui m'était assignée, on m'emmenait tout droit vers la vie de mes parents. Vers l'acceptation bête et docile du petit monde normal. C'est cela que j'ai refusé quand, un soir, en rentrant de l'école, j'ai annoncé à mes parents que je n'irais jamais plus. Pour avoir envie de s'asseoir au premier rang, il faut y croire. Il faut avoir confiance en ce monde et envisager de pouvoir y trouver sa place. Or, je n'avais pas confiance. Et la place qu'ils avaient prévue pour moi, je n'en voulais pas. J'ai détesté l'école parce que je maudissais ce qu'elle me promettait.
L'écriture, ce n'est pas un concours de beauté. C'est avant tout un moyen de s'examiner et de dire aux autres : voyez ce qui m'émeut et me bouleverse. C'est rencontrer l'autre et lui dire : tu n'es pas seul. Nous sommes légion.
Ce n'est pas ta faute si tu t'isoles. Tu ne fais qu'obéir à la marche du monde. Mais une fois l'ennemi identifié, il faut trouver le courage de le combattre. Parce qu'on n'a pas le choix. Parce que l'avenir arrive.
"Quand l'incroyable viendrait enfin à advenir" . J'ai trouvé la formule bouleversante. Ça m'a chamboulé que le mec triste affiché au mur de ma chambre (*) parvienne à transmettre une idée si forte avec des mots si simples. (*Steinbeck)
"Tu sais, a-t-il ajouté, notre société, elle fait des gosses. Mais elle ne prend plus le temps d'avoir des gosses. C'est un problème structurel. Je ne dis pas qu'il faut que tout le monde se transforme soudainement en hyperparents ou en hyperprofs. Juste en adultes qui prennent le temps de penser à cela. Mais l'accélération de la vie ne le permet pas. Comme si on n'avait plus le temps. C'est ça aussi la société de consommation. On produit. On abandonne. Pour produire plus encore. Dans ta radio, tu dois parler du désespoir et de la souffrance des adolescents; De notre incapacité, à nous les adultes, de leur proposer un autre monde. On les gave de médicaments car on est incapables de les gaver d'espoir. Et bientôt, ça nous explosera au visage, crois-moi.
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