Nos insomnies - Clothilde Salelles
Gallimard
L'arbalète
Parution : 09/01/2025
Pages : 256
Isbn : 9782073081551
Prix : 20.50 €
Présentation de l'éditeur
Clothilde Salelles
Source Babelio
Mon avis
Direction dans un petit village de banlieue d'Essonne fin des années 90, un petit pavillon, une famille, un père, la mère, des jumeaux et la narratrice âgée de 9 ans. Elle va nous raconter sa famille, son quotidien et le secret, sujet tabou qui entoure la famille: ce secret est que "la nuit, nous ne dormions pas".
Ce récit c'est le quotidien, des fragments de vie qui nous sont racontés à hauteur d'enfant mais avec une langue maîtrisée, un vocabulaire savamment choisi, un texte littéraire porté par la langue.
Il ne se passe rien de particulier, juste des fragments de vie, elle écoute la nuit les bruits des parents insomniaques, nous décrit l'ambiance "lourde", anxiogène en inventant une langue avec 'journédificil" "maldedos" "chutpapadort" mais aussi un peu plus tard les éléments perturbateurs comme "lotissementd'àcôté" "bruitsd'travaux" "couloiraérien" " cesfoutusavions".
Une famille où personne n'est nommé, juste ces amies d'enfance Marion et Julie chez qui la vie prend une tout autre forme. Chez elle pas de "méparents" "papamaman", c'est "monpère" "mamère", un père qui est là sans l'être, qui s'isole dans son cagibi la journée, qui part promener la chienne. On sent au fil des pages qu'un drame se trame.
Seul moment de répit, les vacances, une certaine normalité en camping mais chaque année est la répétition des précédentes jusqu'au drame.
Difficile enfant de mettre des mots sur ce qui est ressenti quand on ne parle pas dans la famille, même lorsque le drame aura lieu, on ne parle pas sur "cequisépassé" ni du "commentçasépassé".
Ce manque de mots destructeurs deviendra un jour enfin salutaire et salvateur. Un très beau roman porté par la langue, l'écriture est parfaitement maîtrisée, les mots excessivement bien choisis.
Ma note : 8/10
Les jolies phrases
Sans doute avais-je déjà conscience que les choses devaient être verbalisées pour exister.
Tandis que moi, je poursuivais ma non-existence sans mots pour la raconter.
Au milieu de la nuit, je sentais encore un peu de colère, ses flammes se rallumaient ; alors je me concentrais sur cette idée - ma colère existait dans le monde, elle était même, peut-être, justifiée aux yeux de ma mère - et, en me blottissant contre elle, je finis par m'endormir dessus.
Les mots étaient des fauves auxquels on avait rendu leur liberté. Cette liberté était vertigineuse.


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