mercredi 5 juin 2024

Cher instant je te vois - Caroline Lamarche ♥♥♥♥♥

 Cher instant je te vois - Caroline Lamarche  ♥♥♥♥♥










Verdier
Collection jaune
Parution : mars 2024
Pages : 96
Isbn : 9782378561987
Prix : 15 €


Présentation de l'éditeur



C’est l’histoire d’une amitié conduite à son apogée par la proximité de la mort. Un abrégé de quelques mois vécus dans la radicalité du moment.

Avec une lucidité éclatante, Margarida envoie des messages du front auxquels la narratrice répond en lui donnant chaque matin la voix qu’elle lui réclame. Peu à peu se construit une narration qui évoque l’enfance portugaise de Margarida, son amour des mots et des sons, les êtres qu’elle protège, les créations qu’elle mène, l’hôpital, la lutte, l’effroi. Mais aussi le souvenir d’un jardin, la fidélité d’un petit chien, Baudelaire et Jeanne Duval, les migrants devenus frères.

Aiguillonnées par l’urgence, ces pages incandescentes respirent la passion éperdue de la vie. Une métaphore pour notre temps et de la bonté en éclairs pour conjurer notre nuit.


Mon avis

Un poème par jour, Margarida, c’est peu et c’est beaucoup pour notre tendresse captive de ton corps mangé par le crabe sournois.

Ainsi commence ce texte comme un long poème narratif en vers libres, l'histoire d'une amitié,  hommage à la vie écrit par Caroline Lamarche juste après la perte de son amie Margarida Guia.

Un poème par jour pour accompagner une fin de vie, partager leur passion pour Pessoa, Rimbaud, emprunter une phrase de Beckett pour titre, pour ce texte très émouvant.  L'émotion est palpable à chaque page. 

Margarida d'origine portugaise était compositrice sonore, passionnée de poésie.  Une collaboration en  2014 pour "Crimen Amaris" relatant l'incarcération de Verlaine à la prison de Mons et le début d'une amitié.  Margarida meurt d'un cancer à l'âge de 48 ans en juillet 2021, nous sommes en pleine pandémie, la solitude, l'isolement, seul ce fil, ses poèmes comme contact au jour le jour lorsqu'elle rejoindra un centre de soins palliatifs.

La poésie pour exprimer la lumière, toujours l'espoir c'est ce qui m'a frappé, Margarida reste positive malgré sa, ses douleurs intense.s. Un corps qui brûle, des douleurs à l'intérieur,  l'image du Delphinium rongé en une nuit comme ce mal qui la ronge.   Elle veut rester dans l'instant présent, dans la vie malgré tout, malgré les pertes de son frère, de ses amis rongés du même mal, une des causes peut-être de cancer, tout comme la pollution, les pesticides.  Elle combat contre sa maladie comme elle a combattu pour ses amis, les migrants, son engagement dans la société.

Les mots sont choisis à merveille, ce texte est magnifique, un bel hommage à l'espoir, à ses combats.  Après tout que reste-t-il à la fin?  Une ode à la lenteur, à la poésie avant la disparition de notre monde en profitant des dernières gouttes de beauté que nous n'avons pas détruites.


♥♥♥♥♥


Les jolies phrases

Où se niche le deuil dans nos corps ? 
Ne faut-il pas laisser le côté coeur tranquille
quand il réclame un répit ?

Mais où est Dieu en vérité
quand s'épuisent les anges ? 

J'essaie d'accepter mon état.  J'espère guérir. Je le veux. Je ne m'effondre pas.
Mais la douleur me désespère.


Te raconter ma journée.  Hier chez l'ophtalmologue,
je lui ai dit que mes yeux pleuraient au vent mauvais d'avril,
que des rivières en sortaient, m'aveuglaient, effaçant jusqu'aux hirondelles.

Une malchance peut devenir une chance,
un travail, une discipline,
une simplification bienvenue. 

Ne me demandez pas si j'écris
ni pourquoi j'écris.
J'entre en poème
(si du moins ceci est un poème)
pour avoir un peu de répit
une chaise et le silence.
J'entre en poème pour faire taire
tout ce qui désespère les plus jeunes
et fait que les vieux se disent : partons vite.

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