lundi 25 août 2025

Ce que prend la mer - Manon Fargetton ♥♥♥♥♥

 Ce que prend la mer  - Manon Fargetton   ♥♥♥♥♥




























Héloïse d'Ormesson
Parution : 21/08/25
Pages : 304
Isbn : 9782487819351
Prix : 21 €

Présentation de l'éditeur

Sur la piste d'un père muré dans le silence, une jeune vidéaste remonte le cours du temps sur une île écossaise. Son enquête fait resurgir une histoire refoulée, une transmission avortée, dont Maxine comprend qu'elle est la dépositaire.
Violoncelliste de renom, Térence habite une cabane posée sur une dune qui menace de s'écrouler. Alors qu'il est hospitalisé, sa fille, Maxine, découvre dans un tiroir une série de Polaroïds mystérieux, témoins d'une correspondance de près de cinquante ans. Ces clichés la bousculent, et grâce aux indices qu'elle identifie, elle part à la recherche de la photographe sur une petite île écossaise. En fouillant cette terre et les mémoires de ses habitants farouches, c'est un adolescent de dix-sept ans qu'elle rencontre, débarqué sur ce bout du monde pour disparaître. Un adolescent devenu ce père lointain qu'elle voudrait connaître. Car cette île, il l'a inscrite dans leur chair, et elle repartira avec des réponses qu'elle n'attendait pas.

À qui appartiennent les histoires ? À ceux qui les vivent ? À celles qui les racontent ? Ce que prend la mer est le roman d'une transmission avortée, d'un silence qui vient abîmer les êtres jusqu'à ce qu'il soit enfin brisé. Raconter et sublimer le secret décelé pour ne plus jamais vivre empêché. Une ode à la liberté de choisir la voie à emprunter.

Manon Fargetton

Manon Fargetton vit dans le Morbihan et voyage dès qu’elle le peut, en particulier en Écosse. Après dix ans à partager sa vie entre la régie lumière au théâtre et ses romans, elle se consacre désormais à l’écriture. Si elle vient des littératures de l’imaginaire, elle a exploré de nombreux genres au fil des années. Elle a reçu le prix Imaginales pour L’Héritage des Rois-passeurs, le prix Renaudot des écoliers et le prix Chronos pour la série Les Plieurs de Temps, et Le Suivant sur la liste a été couronné par seize prix littéraires. En 2024, son roman Nos vies en l’air a été adapté en série par FranceTV. Tout ce que dit Manon est vrai, son premier roman de littérature adulte, a paru en 2022 et rencontré un grand succès. Ce que prend la mer est le deuxième.





Mon avis

Maxine Andrieu, 32 ans est vidéaste et vit avec son compagnon Gaëtan. Elle se rend au chevet de son père, Térence, un violoncelliste de renom qui vient de faire un AVC.

Seize ans qu'elle n'est plus revenue chez lui, dans la cabane de son enfance, plantée au bord d'une dune de sable.   Sa vie vacille à ce moment comme la cabane risque de le faire, se tenant en équilibre précaire face à la mer suite à l'érosion et au vent.  

C'est plus fort qu'elle, elle doit filmer la maison avant qu'elle ne s'effondre. Il faut vider l'endroit car il ne résistera pas au retour de son père, ses  souvenirs d'enfance reviennent, les étés de ses 3 à 15 ans passés là. Elle hésite à le faire rapidement et décide malgré le danger d'y rester pour trier à son aise. 

Dans un tiroir, elle découvre des polaroïds, diverses vues dont des femmes qui dansent  âgées de 65 à 70 ans, une île, des clichés envoyés au fil du temps depuis 1972 à nos jours.  Un dernier dans une enveloppe datée de janvier, postée à Balvicar, une petite ville en Ecosse, au Nord de Glasgow.

Maxine va partir sur les traces de son père, à la recherche de ce qui a sans doute forgé la personnalité de son père. Son père violoncelliste prodige qui à l'âge de 9 ans avait déjà enregistré son premier disque,  pour qui la musique est essentielle à sa vie. 

En résonnance à l'histoire de son père, Maxine va s'interroger sur le désir de maternité, Elle va filmer et interroger multitude de femmes pour comprendre leurs choix face à la maternité, choix, réel désir, poids de la société, évidence ? Des questions en lien avec sa propre recherche identitaire, son questionnement personnel.

On voyage dans les deux histoires dans une double temporalité entre passé et présent.  La mer et la nature sont des personnages à part entière de l'histoire.  L'écriture est fluide, agréable, tout en douceur, pudeur,  justesse et sensibilité.  

J'ai beaucoup aimé les courts chapitres titrés en français et en anglais comme des plans séquences faisant le lien avec le côté cinématographique.

Je suis heureuse d'avoir découvert la plume de Manon Fargetton dans ce récit abordant les non-dits, les secrets de famille, l'importance des choix dans une vie mais aussi la filiation, le désir de maternité et la parentalité.

C'est un gros coup de cœur.  ♥♥♥♥♥


Les jolies phrases

Ce que la mer veut, la mer prend.

Même la pire des marées finit par redescendre.  Même la pire des tempêtes s'apaise.

Et je crois que c'est le plus beau cadeau qu'on se soit fait l'un à l'autre.  Accepter cette fin.  Ne pas s'acharner.

Et vers quatre heures du matin, le dehors est entré.  De l'eau par dessous la porte, de l'eau qui monte au pied du lit.  Il y a celle qui ruisselle de la falaise et des collines, et celle qui lèche les rues du village par vagues successives à mesure que la marée échappe à l'enceinte des rochers.  Ce que la mer veut, la mer prend.

C'est comme si leurs mémoires se réveillaient l'une l'autre, et Maxine est émue par cette valse.  Le monde que ces deux-là ont arpenté disparaîtra avec eux, mais ils sont là, encore, à en attiser les flammes pour transmettre ce qu'ils peuvent. 

Une pensée la traverse. Ce voyage en Écosse, peut-être que c'est exactement ce dont elle a besoin. Essayer, une dernière fois, de comprendre son père avant de devenir mère.

Toujours une caméra à la main, des plans serrés de chaque détail, des kilomètres de bande-son. Comme s'il lui fallait mettre à distance ses questions grâce à cette démarche professionnelle.

Tu crois que ton don pour la musique t'isole, te sépare des autres, mais nous, quand on t'entend jouer, on se sent moins seul.  Elle dit : Ta musique pourrait aider beaucoup de gens.  


Les premières fois, elle a eu des doutes, parce que l'intensité, parce que la passion, parce que la nouveauté, parce que l'autre qui voudrait plus, qui voudrait tout. Seulement, chaque fois, le doute s'évanouit, les histoires parallèles se terminent. Gaëtan est son point d'ancrage.
Sa maison. De toute manière, aucun couple n'est à l'abri d'une rencontre qui bouleverse ce qu'il a construit, et elle a la sensation que le sien, en s'autorisant à vivre ces attirances, se protège davantage qu'il se met en danger. Ils évitent l'électricité qui ne trouve pas de résolution, l'autre personne désirée qui envahit tellement les pensées qu'il faut tout quitter pour s'y jeter, et l'amertume de la trahison découverte. Depuis sept ans, ce contrat fonctionne pour eux.


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