dimanche 29 décembre 2013

RETOUR A PATMOS PATRICIA EMSENS

Patricia Emsens Retour à Patmos

Editions de Busclats

Septembre 2013
187 pages
Diffusé par Harmonia Mundi
ISBN 978--2-36166-018-5
15 euros


QUATRIEME DE COUVERTURE



Jean est mort et Marie, sa femme, se rend pour la première fois sans lui à Patmos. Patmos, c’était la maison de Jean, son enfance, ses amis, que Marie va retrouver non sans une certaine crainte. Dès l’arrivée sur l’île, les souvenirs l’assaillent : sa rencontre avec Jean, leur vie, la maladie, sa passion folle pour Pierre, metteur en scène et amant insaisissable avec lequel elle a partagé travail et amour avant que Jean n’entre dans sa vie puis à nouveau, plus tard. Et alors qu’elle avance, incertaine dans cette revisitation du passé, Pierre arrive, rejoignant à Patmos son frère et ses neveux en vacances.

Comme dans une tragédie antique, le destin brouille les cartes, et l’île est un théâtre où se joue la dernière scène d’une histoire qui attendait sa fin.
Patricia Emsens, née en 1954 en Belgique, compose ici un premier roman d’amour sensuel et sensible qui est aussi un hymne à la vie.

Un premier roman dans la sélection du prix Première.

MON AVIS

Un premier roman pour une auteur belge.


Hasard ou coïncidences ?


Marie meunier, femme de théâtre, metteur en scène à ses débuts, costumière au Natuional arrive avec les enfants à Patmos dans la maison de Jean son mari médecin décédé deux ans plus tôt.


Elle arrive avec beaucoup de craintes pour retrouver les amis d'enfance de Jean.  D'emblé les souvenirs l'assaillent.  Elle va revivre savie, ses souvenirs.


Jean a souffert dès son enfance du départ de sa mère pour un autre homme vivant à Athènes.  Il avait sept ans et jusqu'à ses 18 ans il viendra chaque été sur cette île.  Il y verra sa mère chaque été.  Le reste de l'année il vit en Belgique avec son père qui digne souffre en silence.  Cela l'a marqué Jean.  Il est enfermé dans sa douleur, cet abandon a laissé des traces, la cicatrice lui fait encore mal.   Cette histoire, il la contera à Marie lors de leur premier voyage à Patmos en 1993.


"Cette partie de sa vie, était si fragile que personne, même pas lui, ne pouvait y toucher."


Les enfants :


- Grégoire est l'aîné, le fils de Jean et Delphine, une erreur de jeunesse à qui il a voulu donner son nom et être présent.  Marie l'a connu qu'il avait sept ans. il veut faire le tour du monde.


"Il lui avait dit aussi de ne plus jamais parler "d'accident", la vie poussait là où elle pouvait. Parfois entre les pierres. C'est la vie qui décide, pas nous."


- Philippe et Louise.  Ils rencontrent des enfants sur la plage.  Hasard ou coïncidence ?, ce sont les enfants d'Augustin Battistoni, le frère de Pierre (aujourd'hui Dassonville) metteur en scène très célèbre vivant au Canada.  


Pierre débarque sur l'île et toute l'histoire de Marie refait surface.


En effet, Pierre était le grand amour de Marie avant qu'elle ne rencontre Jean.

Et si l'histoire se répétait? Si les cicatrices de Jean se rouvraient, sa crainte de revivre cela, enfermé dans sa douleur. 


Un parcours de vie avec ses joies, ses peines, l'amour, la passion, la trahison, l'abandon, la rupture, la maladie, le deuil, l'amitié, la mort....


Et si .... Que se serait-il passé si : 

- Jean était toujours là ...
- Augustin avec sa femme ?...
- Si Marie n'était pas venue sur l'île ?

Beaucoup de questions.


C'est un tout petit livre, 187 pages .  Il se lit d'un coup, d'une traite.  Les phrases sont courtes, incisives.  Un certain rythme d'écriture nous fait voguer de page en page, de vague en vague sur l'île de Patmos.  

C'est sensible, délicat, rempli de pudeur, de souffrance muette.  L'amour est cruel, la douleur est présente, on la ressent presque.

J'ai vraiment aimé ce premier roman émouvant sans pour autant être mélo.


Je vous le recommande.







LES JOLIES PHRASES


L'amour peut-il être si différent d'un homme à l'autre ? Et si oui, quelle femme est-elle, elle d'un homme à l'autre ?  La même ? Une autre ?


Il a la tête qui tourne.  Comme la terre.  Comme la terre qui tourne autour du soleil.


Elle pense au petit soldat de plomb.  

Elle se demande quelle était la couleur de son uniforme.
Elle se demande si le plomb fond, si le plomb dans l'âme fond complètement ou s'il en reste toujours quelque chose...

Elle hésite à se lever, à marcher pieds nus sur les tomettes rugueuses qui recouvrent les sols et à commencer ainsi à tracer un début de la vie sans Jean.



... Et je m'en veux quand les jours passent et que soudain je me rends compte qu'ils sont passés sans que j'aie pensé à lui, comme si je l'avais oublié.  Je n'oublie pas, Marie.  Je te jure.

- je te crois.  Continuer à vivre, ce n'est pas oublier ses morts.  Je crois même que c'est leur rendre hommage.  Je crois que c'est ce que ton père souhaiterait que nous fassions, vivre, continuer à vivre.  Ici, ailleurs...

La vie poussait là où elle pouvait.  Parfois entre les pierres.  C'est la vie qui décide, pas nous, il faut suivre le courant, avait-il dit.


Elle, aveuglée par son amour d'antan qui n'avait plus rien à voir avec ce qu'elle avait connu.  Le passé ne revient pas.  La route est devant nous, se disait-elle, trébuchante.


Quelque chose lâche, comme un ressort dont elle vient d'entendre le clic sans savoir ce que cela veut dire.  Elle a froid, elle se demande comment il faisait avant pour la réchauffer.  Il y arrivait toujours.  Qui des deux est en panne, elle ou lui, se demande-t-elle.  Elle croit encore que c'est peut-être elle


Septembre 2004, Marie vient de rentrer de Patmos où elle passe tous ses étés avec son mari et leurs enfants.  Elle rêve d'autre choses, elle ne sait pas de quoi.  Avant elle rêvait du théâtre dans une famille où personne ne r^vait.  Elle y est arrivée.  Pourquoi pas le reste ?  Se reconnaîtrait-elle si ce reste arrivait ?


Sa vie est comme une mer démontée qui vient se fracasser aux pieds de Marie.  Elle l'éclabousse.


Quand la digue est si fine, il ne faut pas s'en approcher.  Elle craque pour un rien.  Ce n'est pas le poids qui fait qu'elle craque.  C'est la minceur de la paroi.  Pas une vrai digue.


Jean ne se pose pas de questions. Jean ne la met plus en garde.  L'amarre est rompue.  Leur barque vogue au large.

Son timon flottant au creux d'une main distraite.
Jean ne dit rien.
Le courant les fait dériver.
Il ne sait pas où ils vont.
Il ne veut pas perdre sa femme, elle est tout ce qu'il a.
Il ne veut pas d'une femme qui le trompe.

Mon loup, elle l'appelle, mon loup ! Il a une peau de loup, un sourire de loup, une dent de loup.  Un loup apprivoisé pour elle, rien que pour elle.  Quelle illusion !

Carnassier sous son pelage d'hiver.
Carnassier sous son duvet de printemps.




lundi 23 décembre 2013

Le Royaume Voulez-vous m'épouser ? Tome 4 ****

RE
Benoît Feroumont
Parution 04/05/2012
Editions Dupuis
Tout public
  • ISBN/Code-barre: 9782800152158
  • Prix 10.60


RESUME

Anne n'en peut plus. Elle a beau faire tout ce qu'elle peut pour l'en dissuader, François le forgeron s'obstine à la courtiser. Mais il a beau s'ingénier à trouver toutes sortes de stratagèmes, la belle s'accroche farouchement à son indépendance et rivalise d'imagination pour lui échapper. Il semblerait pourtant qu'elle ne soit pas tout à fait insensible au charme de son soupirant...


MON AVIS

Anne est toujours demandée en mariage par le gentil forgeron qu'elle éconduit chaque fois. Un jour il offre une fleur en fer forgé à Candice, la fille du patron de la forge. Anne voit rouge, serait-elle jalouse ??? 
Toujours avec autant d'humour en compagnie des oiseaux qui parlent, nous poursuivons cette bd jeunesse pleine de charme, d'humour. Très agréable à lire, je suis toujours fan.
A découvrir.

Ma note  9/10

UNE SACREE MAMIE TOME 4 ****




























Une sacrée mamie 4

Date de parution : 10/02/2010 | ISBN : 978-2-7560-1705-1 | Prix public : 7.50 €

Scénario :  Yôshichi SHIMADA 

Dessin : Saburô ISHIKAWA  

Série : Une sacrée mamie



RESUME


1958, Hiroshima. À cette époque, il est difficile pour une jeune femme d'élever seule ses deux fils. Elle décide de confier le plus jeune, Akihiro, à sa mère. Dur de quitter la ville pour la campagne sans y être préparé ! Mais le petit garçon s'habitue vite à sa nouvelle vie au grand air. Suivant l'exemple de sa super mamie débrouillarde, il apprend à s'adapter à toutes les situations...


QUATRIEME DE COUVERTURE

Appellation bizarre pour un manga !

"L'avare est démoniaque ! L'économe est un génie ! " Avec sa sacrée mamie qui se fiche joyeusement de la pauvreté, Akihiro mène désormais une vie heureuse à Saga.  Bien qu'il ne puisse pas voir souvent sa mère et son grand frère, le jeune écolier est toujours prêt à se faire de nouveaux amis ou même à découvrir la magie du théâtre ambulant !



Avec cette adaptation en manga d'un roman autobiographique qui a réveillé dans le coeur des Japonais les souvenirs d'un passé où les relations étaient plus humaines, Saburo Ishikawa réussit à nous décrire un monde rural à la fois rude et solidaire, mais aussi plein d'affection.


MON AVIS


Nous continuons à suivre les aventures de Akihiro chez sa grand-mère dans le village de Saga dans la campagne japonaise.  Toujours aussi bien menées, sans violence.  La pauvreté n'est pas si grave, il y a toujours des astuces et puis la plus grande richesse est celle du coeur.  Les vraies valeurs comme l'amitié, le partage, la solidarité sont toujours au centre de ce très plaisant récit.


Un théâtre ambulant arrive à Saga, une nouvelle camarade de classe arrive, Mizuki Asakura.  Elle fait partie des gens du voyage.  Pourquoi est-elle différente ?  Désagréable avec ses copains de classe ?  Ce n'est pas facile de se faire de nouveaux amis si elle sait qu'elle les quittera bien vite.

Un incendie survient et détruit les décors et les costumes du théâtre, et une fois encore la solidarité sera de mise.


Une très jolie série, je ne m'en lasse pas.  Idéale pour les enfants à partir de 7 ans.



Ma note 9/10



LES JOLIES PHRASES


Ma grand-mère dit que si j'ai peu d'argent et beaucoup d'amis, j'aurai réussi ma vie.

Reste toujours sincère et montre-toi tel que tu es sans détour même si c'est dur.


Ce qui est vieux n'est pas forcément sale.


Les objets anciens possèdent plus de valeur que les neufs.


Quand on sait se dire adieu, c'est qu'on a été heureux, si on se dit au revoir, on l'est plus encore, et si on se dit "tiens ! ça fait un bail !alors on est aux anges.


Si on ne pense qu'à l'argent, on perd l'essentiel, ce goût des choses simples.





samedi 21 décembre 2013

Bd et Livre Noir : Noël avant l'heure grâce à 2 partenaires


Merci Babelio et MASSE CRITIQUE




Je vous l'avais annoncé, j'y ai participé et oui j'ai gagné. Donce très vite je vous parlerai de la BD




Mexicana Tome 1
Scénariste Mars et Matz
Dessinateur Gilles Mezzzomo
Thriller Policier
Collection Grafica
GLENAT
Parution 18/09/2013
Format 240x320
48 pages cartonné
Prix 13.80
Ean/isbn 9782723492737

3 tomes à paraître, le 2 est prévu le 19.03.2014

Résumé

L’histoire d’un père prêt à tout pour sauver son fils

Emmet Gardner, la quarantaine, est garde-frontière le long du Río Grande aux États-Unis. Un jour il découvre que son propre fils, Kyle, s'est mis à travailler pour un cartel local et que, pour prouver sa loyauté, il doit assasiner un dealer rival. Pour le sortir de cette sale histoire, Emmet décide de prendre les choses en main et de monter le coup lui-même. Sauf que le dealer en question se trouve être un agent infiltré des stup ! Autre problème : depuis le soir du meurtre, Kyle ne donne plus de nouvelles. Emmet décide alors d'aller le chercher de l'autre côté de la frontière, quitte à se jeter dans la gueule du loup...

Avec Mexicana, Matz fait une entrée brutale dans le catalogue Glénat. L’auteur du Tueur s’associe au scénario à son presqu’homonyme américain Mars pour nous livrer un polar noir et percutant, plus qu’efficacement mis en image par le trait nerveux de Mezzomo.


Un autre grand merci à mon partenaire ROUGE SANG






Damien Ruzé
Editions Rouge Sang
Roman Noir
294 pages
isbn :979-10-92981-06-03
Prix 7.49 euros
Parution 2013

Résumé

Après dix-huit mois derrière les barreaux, Stan retrouve simultanément la liberté et la capacité de lâcher la bride à son ambition démesurée. Objectif : prendre du galon, tracer son chemin dans le cercle très fermé des truands patentés, grimper dans la hiérarchie de l’illégalité. Seulement gaffe, hors de question de retomber. Fini l’amateurisme et les comparses branquignollés. Terminé. Durant son séjour au frais, Stan a accouché d’une pure idée, lumineuse, imparable, un truc à breveter. Il va l’appliquer. Seul contre tous. Déterminé. Et tandis qu’au plus profond des bois de la Sologne se déploient les joutes de la folie et de la cruauté, le destin – cet insatiable joueur de dés – va exaucer le fraîchement relaxé, plaçant sur son chemin un cartel d’individus à l’abyssale dangerosité.


Citation :


« Quand tu lances ta wago dans la vitrine d’une bijouterie place Vendôme, la préservation de la planète, rien à branler, pas vrai ?… »


Avis :


« Quand j’ai reçu « Voilà l’aurore » aux éditions Rouge Sang, je me suis retrouvé comme brutalement jeté ivre dans un torrent d’adrénaline avec « Rock n’ roll nigger » de Patti Smith à plein volume. Ce roman noir est un trait de coke littéraire. »


Marc Louboutin. Directeur de collections.

Voilà une belle surprise de Noël : un petit paquet arrivé ce vendredi.

Je vous avais parlé de "Haut le choeur" voir chronique Rouge Sang Editions que j'avais adoré. Un bon moment en perspective, un tout grand merci.


En savoir plus sur Rouge Sang
un autre auteur de Rouge Sang


































ARDEN Frédéric Verger *** 6/10


FRÉDÉRIC VERGER

Arden

Collection Blanche, Gallimard
Parution : 22-08-2013






Parution : 22-08-2013
480 pages
140 x 205 mm
ISBN : 9782070139736 

L'histoire se déroule pendant la Seconde Guerre mondiale en Marsovie, riche principauté d'Europe centrale. Alexandre de Rocoule, gérant du luxueux hôtel d'Arden, homme à femmes dont la gaieté a quelque chose de féroce, et Salomon Lengyel, veuf sérieux et solitaire, sont liés par une passion commune : l'opérette. Depuis 1917, ils ont écrit ensemble une quantité impressionnante de pièces en trois actes, inachevées car ils ne sont jamais d'accord sur la scène finale. 
Pendant qu'ils travaillent sans relâche, la bête nazie rôde autour de la Marsovie sur laquelle elle ne va pas tarder à poser la patte. Les persécutions de Juifs commencent. Le danger devient pressant pour Salomon et pour sa fille Esther, revenue auprès de son père et dont Alex tombe amoureux. Et si la composition d'une dernière opérette était le seul moyen de leur sauver la vie? 
Il est rare de voir aussi harmonieusement mêlés dans un premier roman l'intelligence, l'humour et la sensualité. Les scènes se déploient dans une profusion d'images éblouissantes, de détails comiques ou touchants, tandis que les rebondissements ne manquent pas dans le livret sanglant qui se joue en 1944 en Europe centrale.




FRÉDÉRIC VERGER

Frédéric Verger est né en 1959. Il enseigne le français dans un lycée de la banlieue parisienne. Arden est son premier roman.



Frédéric Verger




MON AVIS

Nous voici dans la forêt d'Arden - oh combien décrite à maintes reprises dans de nombreuses pages - plus précisément dans l'hôtel du même nom.  Un hôtel, un peu comme un décor d'opérette avec beaucoup de personnages typés, un immense buffet, de grandes tentures et multitude de décorations...


Le maître des lieux : Alexandre de Rocoule, homme à femmes sur le retour, amateur de Strauss et d'opérettes anciennes.  Il en a composé une multitude, toujours inachevées..

Son ami et complice d'écriture est Salomon Lengyel, il est tailleur de son état, il est juif.  Il a une fille Esther qu'il n'a plus vu depuis 3 ans, elle vit à Budapest.  Il lui écrit très régulièrement.

Nous sommes en Marsovie, pays imaginaire , principauté d'Europe centrale.  Ce pays imaginaire est un pays d'opérette.  Effectivement, saviez-vous que ce nom fut inventé par Franz Lehart dans le cadre de sa célèbre "Veuve joyeuse" ?

Pour la petite histoire, Franz Lehart était un compositeur hongrois très apprécié de Hitler et Goebbels, le régime nazi utilisa même sa musique à des fins de propagande.  Franz Lehart utilisait toujours des librettistes juifs.  Son épouse d'origine juive s'était convertie au catholicisme avant leur mariage.

Je vous raconte tout cela, car c'est troublant, nous sommes en pleine fiction, dans un monde imaginaire, des rues, des personnages fictifs, ce livre ne se veut pas historique et pourtant on trouve ici un clin d'oeil avec l'Histoire avec un grand H et la montée du nazisme, la lutte contre le bolchevisme.

Un livre dans lequel nous passerons sans cesse d'une chose à son contraire: la joie, l'exhubérance, l'homme à femmes qu'est Alexandre, la sobriété, la tristesse et la rigueur de Salomon.   Dois-je en déduire un parti pris de l'auteur?  Est-ce pour nous bousculer ?  Tout comme l'écriture en bloc, sans châpitre, ni paragraphe??   Est-ce pour nous désarçonner ? Nous enlever des repères ?

Nous sommes donc dans les environs de la forêt d'Arden , un pays de cocagne qui basculera dans la triste réalité de la guerre, des pogroms et du nazisme.  Alexandre fait partie des nombreuses personnes qui n'ont jamais pris Hitler au sérieux.  Il rit et se moque de la frayeur des juifs, jusqu'au jour où le roi Karol en 1942 autorise un corps de volontaires pour lutter contre le bolchevisme : les gardes noirs.

Les gardes noirs défilent dans les rues le vendredi et le 28 mars 1944 un fait divers sème la terreur : l'assassinat du père Molodine.  C'est le début de l'horreur de la guerre.  Peu de temps après, les allemands envahiront la Marsovie.  des pogroms auront lieu aux frontières, la peur arrive, les juifs doivent être recensés.

Salomon fera revenir sa fille Esther et Alexandre décidera de les cacher.

Voilà, je ne vous en dis pas plus.  J'avoue avoir rencontré des personnages haut en couleur mais le style de l'époque proustienne, flaubertienne n'a malheureusement pas entraîné mon imaginaire dans ses trop, beaucoup trop longues descriptions à mon goût.

J'ai vraiment eu du mal à me concentrer dans cette lecture, le livre ne m'a absolument pas fait voyagé, mon imaginaire n'a rien décodé.  C'est dommage car la plume pourtant est très juste, précise, poétique, très bien maîtrisée.  Le vocabulaire est riche.  Mais que de longueurs pour ce livre toujours en lice dans la dernière sélection du Goncourt 2013.  J'ai été jusqu'au bout de la lecture, le dernier tiers étant un peu plus vivant, souhaitant malgré tout connaître le destin de nos protagonistes.

Je reprendrai pour conclure une critique de Libération de ce 25/11/2013

"Arden a de quoi susciter chez le lecteur l'ennui le plus profond ou le plus déconcertant enchantement. Dans le premier cas, il lui sera insupportable d'être pris dans un texte aussi dense, stylistiquement léché, lourd de réminiscences de classiques rébarbatifs."


Ma note 6/10



LES JOLIES PHRASES


Par la suite il avait continué à se promener dans l'existence comme dans un bal, un bal sans miroirs où l'on ne se voit pas vieillir, et il ne se rendait pas compte que sa démarche, un peu alourdie, ressemblait maintenant pour les autres convives à celle d'un homme qui cherche la trace d'un bonheur passé.


La jeunesse désormais leur paraissait un cliché, et la maturité de leur personnage refléter celle de leur art.

Mais cette oeuvre nouvelle finissant tôt ou tard comme les autres, semblable à ces villégiatures dont on a élevé rapidement les murs mais qu'on ne peut finir.

Sa voix de tenor léger, un peu tremblante , semblait extraire avec délicatesse les mots du papier de soie de la mélodie, comme s'il craignait de les briser.

"Avant de vouloir humer la rose cachée dans le purin, le sage apprend à humer le purin sous les roses."

Le lendemain au réveil, beaucoup, assis sur leur lit, constatèrent avec surprise que la nuit les avait convaincus que les événements de la veille étaient inévitables.  Et certains y voyaient même le châtiment mérité de l'incrédulité stupide et arrogante des Juifs marsoviens qui semblaient croire appartenir à une espèce différente de Juifs.  Croire qu'on ne pouvait pas être massacré méritait qu'on le soit, voilà la loi qu'ils découvraient, le cul sur l'édredon, et trouvaient juste.  Certains crachaient même sur leur pantoufle, furieux d'être à cause des Juifs forcés d'assister à toutes ces horreurs.

Il sentit également en lui, aussi subitement poussée dans son coeur et aussi indéracinable que la certitude de la mort, la résolution de se tuer, totale, froide comme la sueur qui le recouvrait et qui n'était peut-être que le suint de l'épouvante car un calme absolu s'était posé sur lui, seul son coeur battait à tout rompre dans sa poitrine creuse comme un roi abandonné clame dans un palais désert.

Le destin lui même était antisémite, qui comme un garde noir, lui réservait une humiliation jusque dans l'agonie.

C'était comme s'il s'était rendu ce soir-là aussi à un enterrement, celui de sa jeunesse et de l'impavidité héroïque de l'ancien temps, qu'il soupçonnait depuis longtemps moribonde, mais dont il comprit ce soir-là qu'elle étaient bien mortes et enterrées.

Mieux vaut regarder en face les fantômes du passé que d'en être hanté sans le savoir.

Tout le monde trouvait un réconfort dans le plaisir enfantin que font naître les fraternités de catastrophe.

Elle sentait monter en elle le sentiment d'être plus forte et plus seule qu'elle ne l'avait jamais été de toute sa vie. Cette sensation rayonnait dans son ventre, entre ses côtes, l'emplissait d'une chaleur qui la faisait trembler.

Avant même d'y avoir goûté, il lui semblait avoir compris la vérité de l'existence humaine, l'obstination de servir jusqu'à la fin des temps les mêmes vieux plats réchauffés.

Comment mieux se cacher qu'en étant nulle part ? Et comment mieux n'être nulle part qu'en étant partout ?

La passivité est la pire conseillère.  C'est elle que nous devons craindre.







dimanche 15 décembre 2013

MILLENIUM BD Les Hommes qui n’aimaient pas les femmes PARTIE 2



SYLVAIN RUNBERG ET HOMS
d'après le roman de Stieg Larson
chez Dupuis

  • Age du lectorat : Ado-adulte - à partir de 16 ans
  • Etat de la série : En cours
  • Album cartonné - 64 pages en couleurs
  • ISBN/Code-barre: 9782800157771
  • Belgique: 22/11/2013 - 14.50 EUR
  • France: 22/11/2013 - 14.50 EUR
  • Suisse: 22/11/2013 - 21.70 CHF






Tout à son enquête sur le sort d'Harriet Vanger, disparue vingt ans auparavant, Mikael Blomkvist s'enfonce inexorablement dans les méandres de l'histoire de la famille Vanger, dont il exhume les vilains secrets, les hontes et les non-dits. Lisbeth Salander, qui l'a rejoint sur l'île, le seconde. Ensemble, ils réalisent que la disparition d'Harriet n'est peut-être que la partie visible d'un événement bien plus profond, et bien plus sombre. Partis à la recherche d'un fantôme, ils se retrouvent sur la piste sanglante, et bien réelle, d'un tueur psychopathe. Un puzzle terrible se reconstitue peu à peu sous leurs yeux, tandis que pèse sur eux une menace de plus en plus précise, d'autant plus redoutable que leur manque encore la pièce maîtresse d'un drame auquel la disparition d'Harriet est intimement liée...


Millénium entraine le lecteur dans un maelstrom haletant d'enquêtes criminelle, financière et politique au coeur desquelles émergent deux formidables héros, deux justiciers solitaires dans la meilleure tradition du roman à suspens.


Dès la première page Homs et Runberg nous embarquent dans un thriller ancré dans la réalité suédoise que connaît parfaitement le scénariste pour y travailler une partie de l'année. L'histoire est mise en scène de façon spectaculaire et invite à voir "Millénium", comme vous ne l'avez jamais lu.


LES AUTEURS VIA LE SITE DE DUPUIS


Mon avis

Remarquable, noir très noir mais retrace bien le climat du livre et du film.  Il faut s'accrocher pour suivre les divers personnages mais cela tient bien la route.  J'ai vraiment bien aimé, le graphisme, le côté noir, le rendu de l'histoire.  Un bon moment. Une réussite, les dialogues sont tout comme le graphisme très percutants.  






Noël avant l'heure grâce à Babelio

Avis aux amateurs de BD.  Si vous êtes matinal, attention ceci vous concerne.

MASSE CRITIQUE DE RETOUR  


UNE BD EN ECHANGE D'UNE CRITIQUE 



Parce qu'un Noël sans Masse Critique n'est pas tout à fait Noël, nous vous proposons de recevoir une BD en l'échange d'une critique lundi 16 décembre 2013 à partir de 7h avec notre nouvelle opération consacrée à la Bande dessinée, aux comics et aux mangas.

Pour ceux qui ne seraient pas encore familiers avec Masse Critique, rappelons qu’il s’agit d’un programme gratuit qui associe Babelio, les éditeurs et tous les lecteurs intéressés. L'opération est ouverte à tous les internautes ayant déjà rédigé des chroniques sur Babelio. Pour cette édition nous privilégierons les meilleurs chroniqueurs de bandes dessinées, mais il y aura de la place pour beaucoup d’entre vous.

Sinon la règle reste inchangée : Choisissez dans notre sélection les livres dont vous aimeriez écrire une critique. Si vous êtes sélectionné, vous recevrez l’un d’entre eux par la Poste. La seule contrepartie est que vous devez, dans les 30 jours qui suivent, nous dire ce que vous en avez pensé, en bien ou en mal, sur Babelio.

Rendez-vous le lundi 16 décembre à 7h du matin. 
Masse
Critique

Ils ont rejoint ma PAL

Pas très raisonnable  mais c'est comme çà, en voici qui vont rejoindre ma longue pile à lire.


Je ne l'ai toujours pas lu mais je tarde de le lire dès que possible un formidable auteur belge Armel Job.



couverture





Parution : 9 Février 2012
Format : 135 x 215 mm
Nombre de pages : 276
Prix : 19,50 €
ISBN : 2-221-12953-9


Je n'ai pas encore lu cet auteur belge, il y a 2 autres volumes dans ma PAl et je n'en ai entendu que du bien



Un livre à la morale subtile ; un hommage vibrant au combat des femmes pour le droit à la liberté.
Turc grandi en Belgique, Evren achève à Cologne de brillantes études de comptabilité. Hébergé chez son oncle, ce garçon de vingt et un ans, encore chaste et au visage ingrat, s'éprend de sa cousine – la belle et sensuelle Derya. Rentré en Belgique, Evren fait part aux siens de sa décision : il va épouser Derya. Une délégation familiale se rend donc en Allemagne pour demander la main de la jeune fille. Mais les choses ne tournent pas exactement comme prévu : Derya éconduit Evren.
Outragés par cette humiliante fin de non-recevoir, les parents d'Evren cherchent un nouveau parti pour leur fils et choisissent Yasemin, une paysanne anatolienne de seize ans, vive et dégourdie, qu'Evren connaît à peine. Les noces ont lieu, et le jeune couple apprend peu à peu à s'apprivoiser. Jusqu'au jour ou Derya – dont Yasemin ignore l'existence – débarque à l'improviste en Belgique.
Quel secret cache le voyage de Derya ? Qui est véritablement Evren, ce grand garçon obéissant et en apparence si maladroit ? À quel jeu dangereux se livre Yasemin ? Quels rôles viennent jouer dans cette histoire René, voisin de la famille d'Evren et croque-mort de son état, et Marcel, son colocataire, attardé mental qui passe ses journées à visionner les enquêtes de l'inspecteur Colombo ?... Raconté du point de vue des principaux protagonistes – Evren, Derya, Yasemin et René, soumis, chacun à sa manière, au respect des traditions et aux caprices du destin –, Loin des mosquées s'apparente à une tragédie antique. À travers l'évocation des mariages arrangés, Armel Job livre ici un conte à la morale subtile sur le combat courageux des femmes pour le droit à la dignité, à l'égalité et à la liberté.


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Ru

216 pages

Date de parution: 
09/05/2012

Editeur d'origine: 
Liana Levi
Langue: 
FrançaisEAN / ISBN: 
9782253158035




J'étais littéralement sous le charme de son dernier roman Mañ



RÉSUMÉ

Une femme voyage à travers le désordre des souvenirs : l'enfance dans sa cage d'or à Saigon, l'arrivée du communisme dans le Sud-Vietnam apeuré, la fuite dans le ventre d'un bateau au large du golfe de Siam, l'internement dans un camp de réfugiés en Malaisie, les premiers frissons dans le froid du Québec. Récit entre la guerre et la paix, Ru dit le vide et le trop-plein, l'égarement et la beauté. De ce tumulte, des incidents tragicomiques, des objets ordinaires émergent comme autant de repères d'un parcours. En évoquant un bracelet en acrylique rempli de diamants, des bols bleus cerclés d'argent, Kim Thúy restitue le Vietnam d'hier et d'aujourd'hui avec la maîtrise d'un grand écrivain.
Comme un ruisseau – un ru – qui va son chemin selon les caprices de la folie des hommes (…).Martine Laval, Télérama.


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Dans le jardin de la bête

648 pages parution 04/09/2013
EAN/ISBN 9782253164852
Edtion d'origine : Le Cherche Midi



EAN / ISBN: 
9782253164852EAN / ISBN: 
9782253164852

RÉSUMÉ

1933. Sollicité par le président Roosevelt, William E. Dodd accepte d’être le nouvel ambassadeur américain à Berlin. S’il n’est pas diplomate mais historien, il a un solide atout : il est germanophone. Lorsqu’il débarque en Allemagne en juillet, sa femme et ses enfants l’accompagnent. Sa fille, Martha, 24 ans, succombe vite aux charmes du nazisme et plus particulièrement à ceux de Rudolf Diels, le chef de la Gestapo. Au fil des mois, les yeux de W. E. Dodd se dessillent. Il tente d’alerter le département d’Etat américain sur la vraie nature du régime. En vain. Martha, elle, s’éprend d’un espion russe, qui la convainc de mettre ses charmes et ses talents au service de l'Union soviétique. Thriller politique et roman d’espionnage, Dans le jardin de la bête nous introduit dans les coulisses du pouvoir nazi, grâce aux notes personnelles de William et de Martha Dodd, mises en scène avec brio par l’auteur du Diable dans la ville blanche.



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L'esprit de l'ivresse

Août 2013/14.5 x 24/288 pages
ISBN 978-2-330-02354-6
prix indicatif : 21,50€ 
Actes Sud
Elu meilleur premier roman 2013 par Lire

Un homme rentre chez lui, fatigué, usé par l’âge et les regrets. La nuit va tomber, les Iris, sa banlieue parisienne, se dressent dans le crépuscule entre épreuve et destination. Ce trajet familier, Youssef Chalaoui pressent confusément qu’il lui sera fatal. Mais il en ignorera l’impact profond, irrévocable, sur le quartier, ses habitants, le pays. Cette nuit-là, au terme d’un long et hésitant et macabre ballet, la périphérie s’enflamme. Et bientôt, la France entière bascule.

Dans L’Esprit de l’ivresse, la révolution est traitée hors champ ; comme les bouleversements organiques du grand corps malade de la société contemporaine. Chorégraphique et musical, le roman procède par mouvements amples. À la course désordonnée et assoiffée de liberté de Clara S., l’égérie malgré elle, répond la fuite ouatée du Président Henri Dumont, bloc de souffrances et d’indécision. Chacun cherche en lui-même un élan radical, un feu qui brûle jusqu’aux lendemains, un ressort contre l’impuissance dérisoire et l’acharnement magnifique que recouvre l’idée de destin.
C’est par les corps individuels que Loïc Merle pénètre et explore la chair collective d’une Grande Révolte imaginaire dont la proximité plausible (inévitable ?) saisit le lecteur. Par les corps que s’exprime le besoin désespéré d’être ensemble et d’êtreplusieurs, face à l’engrenage du réel – et de la realpolitik – qui broie les êtres et les âmes, atrophie les esprits, avorte la notion même d’avenir.
Cette nuit des hommes, l’auteur la dessine d’une phrase riche et lumineuse, légèrement étourdie, comme exactement ivre. Car, semble-t-il nous dire, de vital et de salvateur, ne nous restera-t-il bientôt plus que l’esprit de l’ivresse ? C’est une des questions cruciales qui traversent ce premier roman d’une ampleur et d’une ambition rares.


«J’ai voulu parler de mes vingt ans où tout semblait possible, et qui fut pourtant la période la plus triste de ma vie… De ce temps perdu dans les bars, sans réelle passion et sans travail… Et j’étais un mauvais poète… Je voulais rendre hommage aux gens qui ont partagé mon état de perdition et ont disparu depuis, j’avais l’impression qu’une génération entière avait sombré avec eux, dans un tourbillon, dans des remous dont l’Histoire se moquait… J’ai voulu parler de l’esprit de ma jeunesse, sans ironie, en affirmant quelque chose…
L’ivresse qui m’a intéressé est un moyen, un véhicule, c’est l’ivresse des petites gens, patiente, répétée, sans but, quotidienne, embarrassée d’être jugée, ivresse qui n’a même pas besoin d’alcool ni de drogue, ivresse de l’homme qui attend, ivresse du flâneur, et de la femme qui se transforme et ne sait comment atténuer les douleurs de cette transformation – ivresse qui est comme un sillon suivi, et, à force, bouleverse toute l’attitude, en bien, en mal, qui « emplit le premier venu de la force des événements », disait Victor Hugo…
J’ai imaginé les conséquences que pourraient avoir en France des émeutes de grande ampleur si elles débouchaient sur une révolte généralisée, pendant laquelle quelques personnages apprennent de leur ivresse ou de celle des autres, tentent de se délivrer de leurs addictions pour en acquérir d’autres, meilleures, en tout cas plus conformes aux temps nouveaux qu’ils entrevoient, cernés par de grandes limites : l’attachement à leurs origines, le rôle qu’ils ont tenu pendant toute leur vie ; la mort ; la fidélité à leurs convictions, à la révolte, à la contre-révolte ; la mort.
Je crois que mon roman essaie d’être honnêtement ivre…»
L.M.

Loïc MERLE

Né en 1978, Loïc Merle a vécu à Lyon, à Paris et en Allemagne, où il a passé six ans et s’est décidé à écrire. L’Esprit de l’ivresse (Actes Sud, 2013) est son premier roman.

mercredi 4 décembre 2013

MONDE SANS OISEAUX Karin Serres Coup de coeur



Collection La Foret
Editions Stock
112 pages
Format 120 x 185
EAN 9782234073951
PRIX 12.5 EUROS


2013-11-13 : Prix Thyde Monnier


RESUME


« Petite Boîte d’Os » est la fille du pasteur d’une communauté vivant sur les bords d’un lac nordique. Elle grandit dans les senteurs d’algues et d’herbe séchée, et devient une adolescente romantique aux côtés de son amie Blanche. Elle découvre l’amour avec le vieux Joseph, revenu au pays après le « Déluge », enveloppé d’une légende troublante qui le fait passer pour cannibale. 

Dans ce monde à la beauté trompeuse, se profile le spectre d’un passé enfui où vivaient des oiseaux, une espèce aujourd’hui disparue. Le lac, d’apparence si paisible, est le domaine où nagent les cochons fl uorescents, et au fond duquel repose une forêt de cercueils, dernière demeure des habitants du village. 
Une histoire d’amour fou aussi poignante qu’envoûtante, un roman écrit comme un conte, terriblement actuel, qui voit la fi n d’un monde, puisque l’eau monte inexorablement et que la mort rôde autour du lac…



L'AUTEUR








Nationalité : France
Né(e) : 1967 
Biographie :

Née en 1967, Karin Serres est auteur et scénographe. Elle a écrit près de vingt-cinq pièces de théâtre dont la liste des titres se décline comme un poème : "Bitume Farouche", "Samouraï Ferraille", "Zut aux pies", "Insolite Soliloque", "Gla-gla"... Certaines de ses pièces (publiées dans la collection Théâtre) ont été créées pour le jeune public, parmi lesquelles : "Marguerite, reine des prés" ou "Colza". Karin Serres écrit aussi des histoires, dont "Lou la brebis" et "Fleurs de vache" parues chez Flammarion.
Site internet : mapage.noos.fr/kserres/ 


MON AVIS

Un véritable coup de coeur. Un petit bijou qui m'a littéralement happée dès les premières lignes dans le monde imaginaire quelquefois inquiétant de Karin Serres.

Karin Serres habituée à l'écriture de théâtre ou de littérature jeunesse réussit de main de maître ce tout premier roman.  Une petite merveille à l'écriture précieuse, poétique, ciselée; oui c'est un véritable travail d'orfèvre que cette fable des temps modernes pourtant bien étrange.


Nous sommes dans un bien drôle endroit.  Dans un village de planches, des maisons de bois toutes colorées, munies d'une roue qui leur permet d'être déplacées lorsque les eaux du lac montent.  Et elles montent chaque année un peu plus depuis le déluge. Un village de pêcheurs, éleveurs de cochons transgéniques fluorescents et amphibies.


Toute la vie de la communauté est gérée par ce lac.  Et lorsque la vie s'arrête, c'est dans le lac que l'on confie les morts, une forêt de cercueils en tapisse le fond. Les cochons roses fluorescents s'y baignent.  Voilà, le décor est planté.

C'est là que naît notre héroïne "Petite Boîte d'Os", fille du pasteur de la communauté.

Ce court roman de 106 pages nous conte sa vie.  Court mais dense car nombreux sont les chemins qui s'ouvrent à votre imagination grâce à l'écriture délicate et précise de Karin Serres.


Petite Boîte d'Os,enfant prend conscience de sa vie au village, elle ne supporte pas l'idée d'avoir cette vie bien organisée, bien régulière, bien policée et sait au fond d'elle-même qu'elle attend autre chose.


Un jour, le vieux Joseph, surnommé "Le Cannibale" rentre au village.  C'est le seul qui ait quitté le village sur une barque il y a des années lors du déluge, il a vu autre chose que leur communauté et pourtant un jour il revient et dit à Petite Boîte d'Os qu'il est revenu pour elle.


Le jour de ses 17 ans ils plongent ensemble dans le lac et explorent la forêt de cercueils qu'il contient  - Petite Boîte d'Os n'explore -t-elle pas son monde intérieur ? - et c'est comme une révélation, leur amour explose au grand jour.  Le véritable Amour celui qui ne s'explique pas, qui vous porte, qui lui donne sa raison d'être.



Ce court roman nous offre une belle réflexion sur le temps qui passe et le cycle perpétuel. La vie n'est-elle pas toujours un éternel recommencement : la vie , la mort, la vie qui revient..Ceci est joliment mis en rapport constant avec la nature et le cycle des saisons. 


"La vie est cyclique.  La barbe pousse sur les joues de Jeff qui la rase, elle repousse.  Il la rase, elle repousse;  L'armée de poils perce la peau du menton et les joues de Jeff, me pique les lèvres quand je l'embrasse et m'embrasse. La vie est ronde.  On se regarde, face à face, tellement près.  On se connaît par coeur, on se redécouvre sans arrêt."


On passera par tous les sentiments : la joie, la tristesse, la mort, la vie. L'écriture est forte et puissante.  Précise très précise, les mots sont choisis avec le plus grand soin.  Les phrases sont courtes aux mots justes et percutants.  Cela me fait assez penser à la littérature japonaise de Kawakami ou Aki Shimazaki.


Le récit est en alternance poétique, tendre mais aussi cruel.  Ce monde imaginaire un peu fou n'est-il en somme pas proche de notre monde réel ?  Un monde en perdition.

N'assiste t-on pas ici au cycle permanent de la vie qui n'arrête malheureusement pas l'évolution et se dirige petit à petit à la perte de l'homme et à l'extinction de l'espèce? 


A noter également un parallèle intéressant  avec la Genèse et la Bible, où l'on parle également du déluge, le père pasteur,  la perte de l'espoir, la fin de l'homme voir la fin du monde?


Beaucoup de pistes donc s'ouvrent à vous.  A vous de choisir votre chemin de lecture. 


Je serai heureuse de partager vos réactions.



Ma note 9.5/10


Un autre avis :  une belle critique de Virginie Neufville




LES JOLIES PHRASES



Au sommet de mon corps, ma tête. A l'intérieur de cette boîte d'os : un flan mou et plissé.  Et c'est cette chose, mon cerveau, qui me permet de penser ?


Nous ne sommes qu'un sac de flan mou dans une petite boîte d'os  !


Comme on lui a appris, il ne montre aucun sentiment : un homme doit savoir se contrôler, et c'est presque ce qu'il  est, un homme, à dix ans.


Ma mère a des yeux bleu rivière gelée, de fins cheveux blonds sévèrement tirés et de hautes pommettes au sang à fleur

J'écris mes premiers poèmes sous un saule, au bord du lac.  Ses longues branchent touchent l'eau tout autour de moi, sa tente vert lumière me protège. Crayon sorti de ma poche, cahier secret sur mes genoux, chuchotement de la mine.  Quand j'écris, une vague d'émotions me traverse, je me sens intensément vivante.....

La blancheur du coton m'aveugle;  Mes doigts transpirent sur le tissu. Distraite, je plante l'aiguille dans mon doigt, le sang jaillit  : un coquelicot dans un champ de neige.  Je suce mon sang, métallique et sucré, il sourd de plus belle.  J'ouvre ma main dans le soleil : entre chaque doigt, la palmure dessine le tutu de  soie des danseuses chauves dont l'une a la tête qui saigne, mitraillée.



Mais comment vivre avec ces seins qui me font mal quand je cours, et ces poils qui poussent partout ?  Suis-je encore moi-même ? Mes pensées vont-elles aussi pousser dans tous les sens et m'échapper ?  Ai-je le choix ? Ne serait-ce pas mieux d'être un homme ?


Petite Boîte d'Os la destructrice, on devrait m'appeler.  Ou bien Ravage.  Je ne les supporte plus, tous, leurs vies, nos vies ordonnées, régulières et policées.  Je déteste notre joli village aux jolies maisons multicolores, bien droites et propres au-dessus de leur joli reflet.  Je hais les jours qui se succèdent, toujours les mêmes.  Le temps passe, je grandis, mon destin se dessine au-dessus de l'eau plate, planche après planche, pas après pas : mariage, enfants, promenade, vaisselle et je n'en veux pas.


Le soleil est encore si pâle, comment croire que c'est lui qui fait fondre l'hiver ?


Je suis de nouveau enceinte.  Celui-là, dans la tête, en secret, je l'appelle KNUT : ça veut dire "NOEUD" en langue ancienne.  Je l'attache par son nom au plus profond de moi, pour qu'il ne tombe pas.


La douleur est peut-être un organisme vivant, invisible, mais réel, qui habite à l'intérieur de notre corps.


Il paraît que nous sommes une sorte de réserve : derrière les montagnes qui rapetissent, une vie urbaine âpre et polluée ferait rage tandis que nous, pêcheurs traditionnels, éleveurs de cochons mutants, nous vivrions dans le passé.


Jour après jour, j'observe la migration secrète des choses.


La vie est cyclique.  La barbe pousse sur les joues de Jeff qui la rase, elle repousse.  Il la rase, elle repousse;  L'armée de poils perce la peau du menton et les joues de Jeff, me pique les lèvres quand je l'embrasse et m'embrasse. La vie est ronde.  On se regarde, face à face, tellement près.  On se connaît par coeur, on se redécouvre sans arrêt.


Jeff sent la terre, la tige de tomates, le vert, et il m'embrasse, moi qui sens la ville, la poussière et le gasoil du bac. 


Je le regarde tous les jours, pourtant.  Sa chair qui s'affine et se plisse, ses cheveux qui blanchissent, je les regarde, je les touche, je les connais, je les aime mais sans observer de changement net, sans comprendre ce que cela annonce, sans voir notre temps passer.  Je n'ai pas vu sa mort arriver. Pas prévu.  Jamais pensé.  Fauchée, je suis, à genoux dans la terre de notre potager.  Stupéfaite qu'il puisse me laisser.


On ne sait pas la dernière fois qu'on voit des gens qu'on aime, que ce sera la dernière fois.



UN ENTRETIEN PUBLIE SUR BABELIO



Entretien de Karin Serres avec Babelio : « Monde sans oiseaux »



Vous êtes auteur jeunesse et dramaturge. « Monde sans oiseaux » est votre premier roman pour adultes. Votre travail d`écriture a-t-il été très différent de celui de vos textes précédents ?

La vraie différence pour moi réside entre le théâtre et le roman, quel que soit l`âge des lecteurs. Au théâtre, d`autres intermédiaires dans le parcours du texte vers le public viendront enrichir ma fiction via sa création et je leur laisse sciemment de la place, ce qui donne une écriture aérée, fragmentaire, à compléter. Dans le roman, je dois tout écrire, c`est un trajet direct de la page aux lecteurs et lectrices, ce qui m`oblige à l`exact équilibre du tout. J`aime beaucoup écrire du théâtre mais je ne choisis pas la forme d`une histoire qui commence, elle s`impose d`elle-même. Et cette force parfois surprenante m`entraîne dans des écritures de forme différente, à des endroits différents dans ma relation littéraire avec le public. J`écris aussi des textes radiophoniques ou des chansons. Sauf commande précise, la question des âges ne se pose qu`après l`écriture. Mon idéal serait d`écrire des textes qui parleraient aux lecteurs de tous âges, à travers des lectures différentes, bien sûr, mais chaque lecture n`est-elle pas singulière ? Une fois mon texte achevé, pour savoir s`il est pour adultes ou plus large, je l`observe de l`extérieur et je me pose cette question : y a-t-il assez de portes d`entrée dans ce texte pour un enfant, pour un adolescent ? “Monde sans oiseaux” peut aussi parler à des adolescents, je crois.


Une « maman-montagne » aux « yeux bleu rivière gelée » … Votre prose est très poétique et également très pudique, sans envolées lyriques ni digressions superflues. Quelles sont vos influences en matière d`écriture ?

Ma plus grande influence vient d`auteurs japonais contemporains comme Yoko OgawaAki Shimazaki,Kobo AbeKenji Miyazawa. Leur justesse, la précision de leurs évocations et leur sensorialité intense me touchent. Ce qui me fascine aussi, c`est la puissance invisible qui jaillit d`entre les pages pour vous saisir brutalement, comme chez William FaulknerFrancisco ColoaneAnnie ProulxJoseph Boyden ou certains auteurs de roman noir comme Ken Bruen ou James Lee Burke. Enfin, le troisième grand courant de mes influences, c`est une matière de la langue, charnelle, tendue et vivante, comme chez Antonio Lobo AntunesLéonora MianoCormac McCarthy ouJon Fosse. Je lis presque exclusivement des auteurs vivants. J`ai fini par admettre qu`une vie ne me suffira jamais à lire tout ce qui pourrait me toucher, mais j`essaie de réduire la hauteur de la montagne de romans de mes contemporains qui m`attendent.


Le lac autour duquel vit Petite Boite d`Os, votre héroïne, est entouré de glaciers, de montagnes et de neige. L`atmosphère arctique, le mode de vie scandinave, vous inspirent-t-ils particulièrement ?

Ce qui m`inspire toujours, c`est la relation entre un espace, les êtres vivants qui l`habitent et le temps. Nous habitons autant les espaces que nous sommes habités par eux. Nous sommes en interaction sensorielle permanente avec le monde. Tout le vivant est proche, qu`on soit humain, animal, végétal ou minéral. Tous, nous traversons le temps et sommes traversés par lui. Et vous avez raison, les univers nordiques, voire arctiques, reviennent souvent dans mon écriture. Les romans deTarjei Vesaas m`ont beaucoup marquée, tout comme les récits de Jean Malaurie, mes origines norvégiennes ou mes voyages de travail en Suède. La part de non-dit vibrant, d`émotions retenues, de lutte contre la violence des éléments dans ces cultures est un formidable terrain de fiction. Et le froid réveille, s`il n`est pas trop extrême.


On apprend qu`il y a longtemps le Déluge a coupé le village du reste du monde pendant des mois, puis les oiseaux ont disparu. Joseph est le seul à s`être aventuré dans la tempête et à y avoir survécu. Ces éléments évoquent la Genèse, L`histoire biblique joue-t-elle un rôle dans votre récit ?

Ce qui est fascinant, lorsqu`on écrit de la fiction, c`est toute la part de ce monde imaginaire que notre cerveau connaît mieux que nous, avant nous. Je n`ai pas décidé en amont de ces références bibliques, elles se sont bâties au fur et à mesure de l`écriture. C`est comme si, chaque fois, un nouveau monde de fiction m`attendait, inconnu au départ. C`est à moi de l`arpenter en pensée pour le découvrir, d`y vivre mentalement pour pouvoir l`écrire. A l`inverse d`une construction rationnelle : une exploration perpétuelle. L`histoire biblique fait partie du “Monde sans oiseaux” à travers des éléments très concrets. Est-ce parce que Narcissus est pasteur, ou l`inverse ? Est-ce parce que face au cycle de la vie et de la mort, on cherche des modèles cohérents de notre monde, on tente de bâtir des systèmes ordonnés ? Et de quels mythes profonds cette histoire biblique elle-même se nourrit-elle ?


A la lecture de votre texte, on se laisse bercer par des éléments très doux mais il y a également des images effrayantes, comme ces cercueils ajourés dans lesquels on place les morts … Pourquoi ce va-et-vient constant entre tendresse et cruauté ?

Les cercueils immergés ne sont pas effayants pour moi. Ce rite étrange est une façon de cohabiter encore un peu avec les morts aimés. L`eau les sépare des vivants comme la terre des cimetières peut aussi le faire.Tendresse et cruauté, nous oscillons toute notre vie entre les deux. Au théâtre aussi, j`écris des tragi-comédies. L`humain est capable du meilleur comme du pire, dans une même vie, dans une seule journée. Nous sommes tous singuliers et singulières mais nous voulons vivre avec d`autres, sans renier pourtant ce que nous sommes et ressentons différemment. Nous comprenons si lentement le monde qui nous entoure, et notre vie est si courte, en regard de cette lenteur. Et pourtant, quelles infimes fulgurances quotidiennes.


La vie de Petite Boite d`Os s`organise autour d`un lac dont le fond est couvert de cercueils et dans lequel s`ébattent d`affectueux cochons amphibies. de l`autre côté du lac, une ville où l`on évite de se rendre. Pourquoi conserver autant de mystère sur cet univers ? Pouvez-vous nous en dire plus sur le monde dans lequel vit Petite Boite d`Os ?

J`ai écrit tout ce que je sais de ce monde, vraiment. Tout ce qui fait partie de cette histoire, en tout cas, et que j`ai entendu. Entendu et ressenti, pas vu : quand j`écris, je n`ai pas d`image, je n`ai que du son et des sensations. C`est ensuite aux lecteurs et aux lectrices de lire, chacun et chacune avec son propre monde intérieur en écho, de lire même parfois entre les lignes, d`aller regarder derrière l`écorce des arbres ou sous la peau de l`eau. L`autre jour, sur France-Culture, Alain Weinstein m`a demandé si les cochons étaient les âmes des morts immergés. Cette idée nouvelle pour moi m`a paru absolument juste et crédible. Chaque fois qu`une idée de ce genre surgit dans l`esprit d`un lecteur ou d`une lectrice, elle augmente les possibilités du monde que j`ai écrit. Il n`y a pas une seule réalité, mais une infinité de réalités possibles reliées les unes aux autres par l`objet-livre, dans toute la diversité des ressentis.


On qualifie votre texte d`inclassable, comment le définiriez-vous ?

C`est bon signe de ne pas pouvoir définir un livre, ou quoi que ce soit qui nous touche. Tout ne peut pas rentrer dans une boîte, un classeur ou recevoir une étiquette. Notre raison n`est pas plus importante que notre sensibilité ou notre intuition. Si je pouvais définir mon livre, je ne l`aurais pas écrit. Au contraire, c`est pour découvrir toute la complexité de son univers que j`y ai plongé.


Votre prochain ouvrage, jeunesse, théâtre ou roman ?

Je viens de terminer trois textes de théâtre qui seront créés entre octobre et novembre 2013 à Angers, Pau et Lisbonne : “Tag”, série noire et rock, sortira en octobre aux Editions Théâtrales, “A la renverse” et “L`abattoir invisible” sont en cours de lecture chez mes éditeurs préférés. Je travaille maintenant sur un chœur fantastique pour adolescents et sur deux nouveaux romans, l`un pour enfants, l`autre pour adultes que je ferai lire bien sûr à Brigitte Giraud, mon éditrice dans “La forêt”.

interview réalisée par Babelio