Deux héroïnes se cachent derrière des barreaux, pour des raisons diverses. L’une est carmélite, l’autre est une épouse dévouée. Ces barreaux, on a, à la lecture du roman, envie de les arracher. Non pas pour aller chercher la carmélite mais la femme de David! Non pas pour l’enlever des sévices que ce dernier lui fait subir mais pour lui parler et essayer de comprendre comment une femme peut être si soumise et malgré tout exister.
Des mots et des questions
Les mots de Fidéline sont crus, clairs, nets, durs et drus, la couleur est annoncée. Ses phrases courtes allègent un peu les deux situations lourdes que subissent les héroïnes.
Le livre qui procure quelques émois alors qu’il ne se veut pas érotique. L’ouvrage dénonce deux situations encore courantes apparemment, mais il ne se veut pas être une diatribe. Une histoire que l’on dévore en une bouchée, parce que l’on a faim de savoir et soif de connaître les réponses aux nombreuses questions qui viennent à l’esprit en le dégustant.
Comme la carmélite Elisabeth ou l’épouse spoliée Sybille, le lecteur ne trouvera son calme qu’à la dernière ligne, ainsi que l’a voulu l’auteur.
Masochisme
Curieuse démarche de Fidéline Dujeu, qui finit presque par confondre deux femmes dans une vie de souffrance extatique qui souvent flirtent avec le masochisme.
Qui ne s’est jamais posé la question de savoir comment il était possible pour un être humain, une femme dans le cas présent, de rester avec un autre être qui le torture moralement et physiquement? Le livre de Fidéline Dujeu y répond par la monstration d’une démarche mentale sans doute commune à bien d’autres.
De même, qui ne s’est jamais posé la question de savoir ce que pouvait endurer une femme qui, volontairement, s’est retirée du monde pour se consacrer entièrement à la prière et à Dieu tout en endurant des souffrances physiques? Le livre de Fidéline découvre l’univers des carmélites qui fascine avec ses cilices, flagellations, claustration, culture de la culpabilité et plaisir de l’offrande de sa souffrance à son amant virtuel qui est Dieu.
Et la force de l’auteur est de ne pas comparer. Elle ne rend pas non plus les deux héroïnes complémentaires mais elle les place face à face, chacune dans sa prison qui ne les retient plus que pour des raisons intellectuelles. Cette petite phrase qui commence le roman et que l’on retrouve en quatrième de page, explique tout: «Je suis un asticot, même pas une mouche. Je rêve d’être une mouche. Je me débats, me tortille, rampe. Il me manque des ailes.»
Ces ailes, vont-elles pousser? La réponse est derrière «les barreaux aux fenêtres» de Fidéline Dujeu.
 
Dans les librairies dès le 17/10 au prix de 12€; Ker éditions