mardi 19 novembre 2024

Dans quel monde on vit - Ralph Vendôme

 Dans quel monde on vit  -  Ralph Vendôme


























Meo
Nouvelles
Parution : janvier 2024
Pages : 132
ISBN: 978-2-8070-0416-0
Prix : 16 €

Présentation de l'éditeur



Dans quel monde on vit…

Une femme révèle à ses enfants qu’une autre vie était possible, sans maternité. Un patron charismatique applique une notion particulière de la logique industrielle. Une jeune fille ne sait plus à quelle morale se vouer, qui sont les bons et qui les méchants.



Dans quel monde on vit…

Les artistes contemporains reculent plus loin encore les frontières de l’absurde.

La dictature est une affaire de famille.

Le routier se pend après avoir entraîné son camion sur une pente honteuse.

L’ange d’affaires retourne sa veste côté démon.



Dans quel monde on vit n’est pas une question, c’est un constat.

Ces onze nouvelles orientent le projecteur de manière à créer d’immenses ombres au tableau.

L'auteur

Ralph Vendôme, bruxellois, est né à Beyrouth et vit à Bruxelles depuis son adolescence. Il a publié La théorie du parapluie aux éditions du Scalde en 2019, un recueil qui explore les similitudes entre enfance et vieillesse, et L’horloge interne en 2020 aux éditions Lamiroy. Il a également contribué à plusieurs ouvrages collectifs de ce même éditeur avec ses nouvelles Les triplées (2021), La barque de mon père (2022), et Ma visite à l’Atomium (2023). En 2023, sa nouvelle Classe affaires a ouvert le numéro 308 de la revue Marginales dirigée par Vincent Engel.

Source : Meo





Mon avis

"Dans quel monde on vit" c'est un total de onze nouvelles qui nous alerte l'air de rien sur l'évolution du monde qui nous entoure.  

J'ai cherché une thématique centrale que je n'ai pas trouvée au premier abord car l'auteur nous emmène dans des univers différents  :

-  un "speed dating" particulier qui des futilités nous ramène à l'essentiel, à ce qui bouleverse nos vies, ici l'amour.

- le monde des affaires dans "Logique industrielle" où un patron de société convoque tout son personnel, la presse pour une annonce, on craint le pire et ce n'est pas celui qu'on croit.

- "Dans quel monde on vit"  nous entraîne dans le monde de la nuit. Pour survivre Nadia se prostitue, elle va croiser le chemin de voyous et être liée à une enquête policière.

- "Lola Aa@h" nous entraîne dans le domaine de l'art un peu particulier.

- "Riri, Fifi, Loulou" interroge sur la maternité et le monde du travail. 

- "Dans la haie"  c'est Colin qui se projette dans la vie des autres, il est voyeur et pas acteur, aveuglé par la réalité.

On parle encore d'amour, d'argent, d'art, de moralité, d'immoralité, de profit dans la société, de démocratie ou de dictature.

En regardant la couverture intrigante et en pensant à chaque nouvelle, je me suis dit mais bien sûr, le lien c'est la chute, le vertige , ce monde dans lequel on vit qui parfois nous échappe et nous entraîne ailleurs, loin de ce que l'on imagine. 


Une jolie plume fluide, qui pousse l'air de rien à la réflexion.

Ma note : 8.5/10

Les jolies phrases

L'essentiel est ce qui bouleverse votre vie.

La honte vient du regard des autres, des mots des autres, les jugements, les sentences.

Dissimulé dans la haie, gourmand d’instants volés, je n’en perdais pas une miette. Je respirais lentement et profondément, comme une plante verte.


J’aime l’idée d’une immobilité apparente que des forces invisibles nourrissent de l’intérieur. Grandir sans bouger.

Du même auteur j'ai lu

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dimanche 17 novembre 2024

Debout, les arbres ! - Carl Norac et Stéphane Poulin ♥♥♥♥♥

 Debout, les arbres !  -  Carl Norac et Stéphane Poulin  ♥♥♥♥♥

















Ecole des loisirs
Pastel
Parution : 25/09/2024
ISBN : 9782211330794
Prix : 15.50 €


Présentation de l'éditeur

Zad le sanglier adore les arbres. Parce qu'un arbre ne ment jamais et ne dit pas de bêtises. Par contre, Zad n'aime pas les gens. Ils sont les seuls ennemis de la forêt, ceux qui coupent tant de troncs sans réfléchir. Zad chasse les intrus avec sa catapulte à pommes de pin. Mais quand la société immobilière des Quatre Frères Grandes Mallettes décide de raser la forêt à grands coups de tronçonneuse, peut-être devra-t-il se rapprocher de la belette Miss Angel et des autres animaux de la forêt pour éviter cette catastrophe.

Carl Norac

Né à Mons en Belgique en 1960, Carl Norac écrit des livres pour la jeunesse dont la plupart sont publiés chez Pastel. Certains sont traduits en quinze langues.
Les mots doux, illustré par Claude K.Dubois, fut un best-seller aux U.S.A en 1998.
Les livres réalisés avec Louis Joos sont basés sur des voyages réels, en Norvège, en Indonésie, au Sénégal et au Québec.
Carl Norac est aussi un auteur de théâtre et de poésie pour adultes. Son recueil, Dimanche aux Hespérides, lui vaut une reconnaissance en Belgique et en France. Plusieurs prix littéraires et sa présence dans deux anthologies historiques récompensent cette publication. Grand voyageur, il parcourt le monde de l'Asie à l'Arctique. Carl Norac assure actuellement le cours d'Histoire de la Littérature au Conservatoire Royal de Mons, une école nationale pour les futurs comédiens. Il aime sillonner la France et la Belgique à la rencontre des enfants des écoles maternelles et élémentaires, pour y parler de ses livres et de ses voyages. Il vit à Olivet près d'Orléans. N'oublions pas qu'il est aussi le père d'une petite fée appelée Else. Carl Norac est ouvert au dialogue avec les enfants, les enseignants et ses lecteurs.

Stéphane Poulin


Stéphane Poulin est né à Montréal en 1961 et y vit toujours actuellement. Illustrateur prolifique, il a collaboré à plus d'une centaine de livres et remporté de nombreux prix nationaux et internationaux. Il a une prédilection pour la peinture à l'huile. C'est cette technique qu'il a utilisée dans « La vie en bleu », sa première collaboration avec Carl Norac.









Mon avis

Un magnifique album à mettre dans un maximum de mains ! C'est beau, malin, intelligent et une belle manière de parler d'écologie, de différence aux enfants.


Zad est un sanglier solitaire, il adore les arbres, les préfère aux gens car un arbre cela ne ment pas. Zad - j'adore le jeu de mots - à sa zone à défendre, sa forêt. Cela l'énerve un peu quand Miss Angel enlace les arbres, je vous l'ai dit, il n'aime pas les gens et il fait le dur, chasse les intrus avec sa catapulte à pommes de pin, mais en réalité il a un grand coeur. Il est solitaire et devrait peut-être avoir des amis car un grand danger menace la forêt : les Quatre Frères Grandes Mallettes décident de raser les arbres pour y construire des maisons.


Un livre qui s'adresse aux 6-8 mais à lire par tous, d'autant plus que le dessin de Stéphane Poulin est juste sublime. C'est une vraie immersion dans la forêt qu'il nous propose, on respire, on ressent le vent qui souffle, on sent l'odeur des bois, les couleurs sont magnifiques tout en douceur.


Ce livre je l'adore, lisez-le, offrez-le, il est vraiment extraordinaire.


Ma note : ♥♥♥♥♥










samedi 16 novembre 2024

Renard rusé - Servais

 Renard rusé   La faune symbolique -  Servais




























Dupuis
Parution : 13/10/2023
Pages : 80
Isbn : 978-2808502733
Prix : 17.95 €

Présentation de l'éditeur

Une jeune femme, de nos jours, se livre à une cérémonie chamanique, espérant découvrir son animal-totem par le biais d'un dessin automatique réalisé en état de méditation. Peut-être les qualités de ce dernier parviendront-elles à résoudre les problèmes qu'elle rencontre dans sa vie... Son totem se révèle être le renard. Un animal à qui l'on prête bien des fourberies, mais que Jean-Claude Servais va mettre en lumière dans toute sa vérité et son intelligence, au gré de légendes aussi étonnantes qu'inattendues.

Portés par l'imaginaire du maître et tout son talent graphique, vous assisterez ainsi à la distribution des queues, à l'époque où les animaux n'en possédaient pas, ou encore à la quête du renard pour délivrer la belle saison. Le tout en visitant Ésope mais aussi Le Roman de Renart, sur fond d'une formidable ode à la nature, plus que jamais la signature de Servais, grand maître de la BD actuelle et grand explorateur de notre imaginaire collectif.



Servais

Jean-Claude Servais naît le 22 septembre 1956 à Liège (Belgique). Son enfance paisible se déroule sous le signe de vacances et week-ends passés chez ses grands-parents à Jamoigne, dans la Gaume, où balades dans la nature, jeux et amitiés rythment son quotidien. Adolescent, alors que ses sœurs se passionnent pour les vêtements, lui achète des bandes dessinées et se voit déjà un avenir tout tracé dans le neuvième art ! Son père espère une passade. Mais l'amour du jeune Jean-Claude pour le dessin le pousse vite vers les bancs de la haute école St-Luc à Liège, en section Arts graphiques.

Dès 1975, avant même la fin de ses études, il fait ses premières armes dans Le journal Spirou et ses rubriques Carte blanche et Découvertes Dupuis. En 1976, désireux de renouer avec ses souvenirs d'enfance, Servais quitte Liège pour emménager avec sa grand-mère. Il ne quittera plus cette maison, qui accueillera par la suite sa femme et leurs trois enfants. En 1979, avec la collaboration de Gérard Dewamme, professeur rencontré pendant leur service militaire commun, il publie « Tendre Violette » dans la revue (À Suivre). De plus en plus demandé et désireux de multiplier les projets, Servais travaille alors dans trois styles distincts, ce qui lui permet de mener, en plus des albums de « Tendre Violette » (publiés chez Casterman à partir de 1982), les récits La Tchalette (Lombard) et Iriacynthe (Bedescope). Avec Dewamme, il réalise également Montagne fleurie chez Glénat (1988). A cette époque, le style de Servais s'affirme avec force, tout comme ses envies de récits profondément régionalistes. Une veine à laquelle il ajoute un soupçon d'anticléricalisme dans L'Almanach (Casterman, 1988), dont les planches seront ultérieurement découpées en deux volumes : Les diaboliques et La petite Reine. Servais chemine ensuite avec le barde wallon Julos Beaucarne pour L'appel de Madame la Baronne (Casterman, 1989), où son style graphique prend un tournant remarqué.

L'année 1992 sonne le début de la grande aventure avec Dupuis, avec la publication chez Aire libre des deux tomes de « Lova », l'histoire d'un enfant-loup en Gaume réalisée avec le coloriste Émile Jadoul, professeur à St-Luc. En 1994, le même tandem propose la collection « La mémoire des arbres », remarquable ode à la nature abritant de puissantes histoires humaines. La hache et le fusil en est le premier diptyque. Servais y développe, avec Gérard Frippiat (secrétaire de Julos Beaucarne) et Jean-Claude Bissot, une histoire inspirée de celle du meurtrier Roger Champenois. Au départ prévue pour un film, l'intrigue de La hache et le fusil propose des personnages ayant le visage de certains acteurs originellement prévus au casting. Complété aux couleurs par Raives, Servais poursuit la « Mémoire » avec Les seins de café (1995-1996), plongée dans le monde de la contrebande frontalière du début du 20ème siècle. Lui succède La belle coquetière (1997), suivant les pas d'une famille de hors-la-loi séduisants leurs victimes puis La lettre froissée (1999-2000), récit mettant en scène des enfants juifs cachés dans le château du Faing, tout près de chez Servais. Le dernier diptyque, Le tempérament de Marilou, paraît en 2003-2004. Les Éditions Dupuis, très attachées à Servais, rééditent La Tchalette et Isabelle dans cette même collection.

L'aventure de « La mémoire des arbres » laisse encore le temps, cette fois chez Aire libre, au stakanoviste Servais de créer d'autres histoires. Ainsi Fanchon (1998) puis le diptyque « Déesse blanche, déesse noire » (2001-2002). En 2003, Servais relance (sans Dewamme) la série « Tendre Violette », colorisée pour l'occasion. Deux nouveaux tomes sortent : Lucye puis le diptyque Les enfants de la citadelle. Afin de célébrer cette série devenue incontournable, la commune de Florenville accueillera un magnifique bronze sculpté par Francis Daras. En 2005, Servais publie les 2 tomes de « L'assassin qui parle aux oiseaux » en français et en patois gaumais chez Aire libre. En 2008, ce sera Le Jardin des Glaces.

2009 et 2010 marquent un tournant dans l'œuvre de Jean-Claude Servais, qui se lance dans la réalisation d'« Orval », où il raconte l'Histoire de la célèbre abbaye. En 2010, le Musée du Fourneau Saint-Michel (Saint-Hubert) accueille une exposition permanente de Servais. En 2011, une fresque de 50 m2 reprenant un dessin d'« Orval » est réalisée sur un pignon de Florenville, devenant une étape du « Parcours Servais », comprenant également une fresque à l'abbaye d'Orval. D'autres réalisations similaires ont été réalisés en dehors de la Gaume, à Tubize ou encore Louvain-la-Neuve.

Éprouvant le besoin de retrouver la nature, les bois, les animaux, Servais réalise alors Le Dernier Brame (2011). En 2012 et 2013 paraissent les deux tomes de « Godefroid de Bouillon ». Toujours chez Dupuis, Servais se lance ensuite sur « Les chemins de Compostelle » (2014-2017), pour 4 tomes suivant chacun un personnage en quête d'aventure.

En 2018, Jean-Claude Servais, qui a toujours contribué au rayonnement de sa région et de la Wallonie, reçoit du Gouvernement wallon le titre d'officier. Cette même année sort Le Chalet bleu, une ode à la nature doublée d'un poème rythmé par les âges de la vie et les saisons. En 2019, Servais publie Le fils de l'ours, contant la tragique histoire entre une montreuse d'ours et un riche paysan. La même année, Servais se voit consacrer au Musée en Piconrue, à Bastogne, la plus grande exposition jamais consacrée à son œuvre, avec une sélection de 120 planches originales et une scénographie immersive.

En 2020, Servais, toujours aussi attaché aux animaux, propose chez Dupuis Le loup m'a dit, où il retrace, entre conte et documentaire, l'histoire des relations entre loups et humains depuis la préhistoire. Conteur infatigable, Jean-Claude n'a pas fini de nous faire rêver. Ni de nous surprendre !

Indissociable de sa région de la Gaume, Jean-Claude Servais en explore le terroir et l'Histoire au gré d'albums développant un style graphique identifiable entre tous. Indissociable du catalogue Dupuis, grand maître de la bande dessinée franco-belge et prodigieux conteur, on lui doit de très nombreux albums essentiels, comme ceux de « La mémoire des arbres » ou encore ses participations à la prestigieuse collection Aire libre. Ouvrir un Servais, c'est la promesse de vouloir les ouvrir tous.

Mon avis

"La faune symbolique" est une nouvelle série proposée par Servais.  Objectif : mettre en avant un animal différent dans chaque volume à travers des légendes, des fables, des contes. 
Le premier tome est consacré au renard à travers entre autres "Esope" et le célèbre "Roman de Renart".

Juliette fait le lien entre les histoires à travers son animal totem mais cela reste un peu décousu. On y découvre avec émerveillement l'apparition des saisons, la symbolique des rêves, les caractéristiques du renard (rusé et malin et voleur), la peur qu'il occasionne.  

J'ai particulièrement aimé la fable de Victor et Léopold montrant que la richesse véritable est celle du coeur.

Fée ou sorcière font partie de l'imaginaire de Servais qui adore exploiter les légendes.

Le dessin est vraiment sublime, le renard dans tous ses aspects est juste magnifique.  Amoureux de la nature vous allez adorer cet album mis en couleur par Raives.  

Fidèle à sa tradition de joindre des mots à l'image, on retrouve un texte pour clôturer l'ouvrage,  "Renard, l'ardennais"  d'Adrien de Prémorel .

Ma note : ♥♥♥♥♥



Du même auteur j'ai lu


Beaucoup de titres, la liste est longue, il suffit de cliquer sur le lien pour avoir accès à ma chronique

Les chemins de Compostelle
Les chemins de Compostelle Tome 2
Orval
Tendre Violette 1. Julien
Tendre Violette 2 et 3
Le jardin des glaces
Fanchon
L'assassin qui parle aux oiseaux
Tendre Violette 4 et 5 L'alsacien et Lucye
Tendre Violette 6 et 7 Les enfants de la citadelle
Les chemins de Compostelle T3
Les chemins de Compostelle Tome 4
Le chalet bleu
La lettre froissée
Le fils de l'ours
Lova
Le loup m'a dit
Le loup m'a dit 2
La belle coquetière
Bellem










mercredi 13 novembre 2024

Eureka dans la nuit - Anne-Sophie Kalbfleisch

 Eureka dans la nuit   -  Anne-Sophie Kalbfleisch

 


Rouergue éditions
Parution : août 2024
Pages : 384
Isbn : 978-2-8126-2611-1
Prix 22 €
Finaliste du Prix Rossel 2024

Présentation de l'éditeur


Lorsque le détective frappe à la porte de la minuscule maison où Ellie a trouvé refuge, le moment est venu de raconter. L’amour pour May. Le départ de celle-ci, harponnée par son rêve de baleines. Loin d’Eureka, cette ville dévote, cernée de gigantesques champs de maïs.
Peu à peu se dessine une enfance, auprès d’un père rigoriste et violent, dans l’orbite des grands propriétaires de la région. Alors qu’Ellie fait tout pour partir à la poursuite de May, le chemin qu’a suivi sa mère se révèle sous ses pas, faisant surgir son fantôme.
Ellie découvre alors ce qui hante Eureka, les choses qu’on y tait, celles qu’on n’ose dire qu’à travers la Bible. Et quel fut le destin de la fragile et scandaleuse Eleanor, qui ne voulait pas se soumettre.
Dans un premier roman qui impressionne par sa maîtrise et la beauté de son écriture, Anne-Sophie Kalbfleisch suit le passage à l’âge adulte de deux jeunes êtres en quête de liberté, Ellie et May, l’énigmatique et la volcanique.



Anne-Sophie Kalbfleisch

Née en 1988 à Bruxelles, Anne-Sophie Kalbfleisch est enseignante en physique. Elle a participé en tant que commandante à une simulation de mission sur Mars dans le désert de l’Utah. Cette expérience lui a inspiré ce récit ancré dans l’Amérique profonde, ses ambiguïtés et ses inégalités. En 2015, elle a été lauréate du Prix du Jeune Écrivain pour sa nouvelle « Un ours, et d’autres évidences ». En 2024 paraît son premier roman, Eureka dans la nuit, aux Editions du Rouergue.






Mon avis

Un détective frappe à la porte chez Ellie, elle savait que ce moment viendrait, cinq mois déjà qu'elle a fui Eureka. 

Eureka, une ville dévote, entourée de champs de maïs.  Ses églises, une ville intolérante, Dieu est partout, le patriarcat domine mais aussi une riche famille avec son usine et son hôpital.  Eureka, une ville où sévit la peur, la crainte du changement.  Une ville paumée où il n'y a plus d'espoir pour les femmes et les jeunes filles tant la domination des hommes les écrase.

Mais le détective est là, il est temps de raconter. Mais par où commencer car il y a deux débuts, le visible qui a commencé lorsque May, sa seule amie a quitté la ville et l'invisible plus lointain.

Habilement et par le biais d'un roman choral, Anne-Sophie Kalbfleisch nous fait remonter le cours des choses.  Tour à tour en plus de l'enquêteur, de courts chapitres au nom de May, Ellie et Céleste s'alterneront dans le temps et dans l'espace.  Une construction habile qui nous donnera peu à peu des éléments à assembler pour comprendre ce qui a réellement poussé Ellie à fuir son père Astor et cette ville.

C'est un roman d'émancipation, un roman féministe, noir, très noir mais les ombres révèlent aussi de la lumière.  

Ellie a un père violent, rigoriste, qui va à l'église tout le temps et ne laisse aucune liberté, ne donne aucun amour à sa fille.  La seule personne qu'elle voit c'est May car son père est pasteur, c'est son unique amie, son amour.  Quelles ne sont pas sa surprise et sa peine lorsqu'elle lui annonce alors âgée de  18 ans qu'elle s'en va, quitte cet enfer pour se libérer, parcourir le pays pour rejoindre l'océan et partir sauver les baleines.  C'est elle qui va éveiller Ellie.

Ellie n'aura plus qu'une chose en tête, la retrouver.  Pour cela il faut trouver de l'argent, travailler de nuit à l'insu de son père.  Elle raconte son histoire.

Ce qui marque dans ce récit c'est l'atmosphère, l'ambiance oppressante, la spirale dans laquelle Ellie est condamnée si elle ne fuit pas.  Elle va indirectement suivre les traces de sa mère, morte lorsqu'elle était enfant.  Suicide, meurtre ? Sa route va croiser des personnes qui savent et peuvent l'éclairer.

Je ne vous en dis pas plus si ce n'est que c'est passionnant, extrêmement bien écrit.  Une plume aiguisée qui nous fait vraiment ressentir l'ambiance d'une ville reculée des Etats-Unis. Le poids des croyances et de la religion sont omniprésents.  Ce récit nous parle de la violence ordinaire dans les villes de l'Amérique profonde mais aussi de rêve, de liberté, d'émancipation. 

A côté de l'ombre, il y a toujours la lumière, l'espoir, c'est le pouvoir des mots, ceux du dictionnaire ou de Melville "Moby Dick"

Un très beau premier roman finaliste du Prix Rossel 2024.

Ma note : 9.5/10


Les jolies phrases

C'est quoi, un parent, finalement ?  Un code génétique ?  Un nez de travers ? Des yeux bleus ?  Ou cet amour inconditionnel, auquel je voulais croire de toutes mes forces ?  

Pour comprendre ce qu'il s'est passé, il faut comprendre l'enchaînement des événements. Certains humains explosent comme des bombes atomiques.  Astor n'aurait jamais eu cette réaction si je n'avais pas désobéi, et je n'aurais pas désobéi si ... 
J'hésite.  A dire : Si May était restée.
J'inspire et je dis : Si je n'avais pas eu besoin d'argent.  De beaucoup d'argent.
Et c'était aussi vrai.
Je n'avais pas menti.

Tout n'est que destruction en devenir.  Mais destruction ne signifie pas disparition.  On lui a appris que rien ne se perd rien ne se crée.  Le grain de suie vient du pétrole, qui vient du plancton.  Le ver se nourrit d'un cadavre, qui se nourrissait de chair, nourrie de végétaux. Et ainsi de suite.

Après le mensonge, plus rien n'avait de sens. Mais aussi tout devenait possible. Même l'insensé.  Surtout l'insensé.

Si l'enfer a une porte, le mensonge en est la clé !

La remise au jour d'un seul mensonge semait le doute sur tout le reste. 

Dans le nettoyage, elle trouve la même satisfaction que dans les mathématiques : dégager un peu d'ordre au sein du chaos. 

Mon Dieu. J'avais espéré un conte.  Qu'on me dise : gentille princesse, mauvais sort.  A la place on me servait les délires d'un esprit malade.  Un ramassis de mensonges, juste bons à se déresponsabiliser du pire.  

Elle se demande quel est le sens de cette bataille, de toute bataille, y a-t-il jamais un vainqueur ou seulement des perdants ?






mardi 12 novembre 2024

Au-delà du vieux mur - Olivier Terlinden ♥♥♥♥♥

 Au-delà du vieux mur - Olivier Terlinden  ♥♥♥♥♥










Weyrich
Plumes de Coq
Parution : 02/04/2024
Pages : 152
Isbn : 9782874899287
Prix : 16 €


Présentation de l'éditeur



J’ai rencontré le vieil homme le soir de la tempête. Il sortait de la bergerie dans son bleu de travail décoloré. Quand il me vit, grelottant de froid et de peur, il m’invita à me réchauffer dans le grand salon du manoir, au cœur du domaine d’Hermeline. À la fois châtelain et jardinier, cet homme gardait un trésor. Oublié des hommes, le domaine d’Hermeline dort en bordure du village. Dans ce royaume où vit un vieillard solitaire, un enfant apprend à aimer la terre. Il y découvre la valeur du silence et de l’amitié. Esquisse d’un monde effacé qui, peut-être, quelque part, existe encore.


Olivier Terlinden



Olivier Terlinden, 36 ans, est agronome et photographe nature. Né en bordure de forêt, il s’est passionné pour la vie sauvage depuis son plus jeune âge.

Aujourd’hui, Olivier a troqué l’appareil contre la plume. S’inspirant des lieux photographiés durant des années, il nous offre avec Au-delà du vieux mur un subtil récit initiatique.




Mon avis

C'est un récit initiatique, d'apprentissage que nous conte ici Olivier Terlinden dans son premier roman.

François est un gamin des villes, solitaire, orphelin à la naissance, lui reste un père absent qui le dépose les week-ends et vacances chez ses parents.  Un village en bord des bois et des champs, un immense domaine entouré d'un vieux mur, une grille et surtout un panneau "Propriété Privée! Défense d'entrer !" qui donne envie de braver les interdits.

François fait la connaissance de Jules, le fils du garde-chasse et d'Arthur.  Très vite il déloge chez Jules et planifie d'entrer dans le domaine qui se nomme Hermeline.  C'était pendant longtemps un ancien couvent qui, ils en sont certains, cache un trésor , celui des templiers peut-être!   Ils s'approchent souvent du domaine sans en braver les interdits et pourtant, un jour..  Un bête pari de gosses, toucher la queue de la grosse Mahaut, c'est la laie qui souvent occupe Hermeline, une course folle pour l'éviter, un orage, trempé, apeuré, François va faire une rencontre qui va changer sa vie, un vieil homme en bleu de travail, le châtelain et jardinier, le gardien du trésor.

C'est le début d'une amitié, la découverte d'un monde merveilleux, d'une belle complicité.

La nature est un personnage à part entière dans cette petite pépite, Olivier l'aime, on le sent avec lui, on la respire, on la voit, on sent le vent qui nous effleure, le bruit de la rivière, on part à la découverte du domaine, à la cueillette des champignons, dans l'observation de la roussette.

On rentre dans un univers onirique en croisant Marise, la fille à la robe de lin qui ne laisse pas François indifférent, on entend les légendes de la forêt, ses fées, ses lutins et qui sait peut-être sa sorcière en la personne de la Tchôca.  J'avais l'impression de voir apparaître les personnages de Servais, cet univers sublime et merveilleux.

Un roman qui nous ramène à l'essentiel, au beau, l'écriture est sensorielle, poétique, limpide. Ce livre est une bulle en dehors du temps, un petit moment de beauté et de réconfort.

Ma note : 9.5/10


Les jolies phrases

La terre est pareille à une femme.  Ce n'est pas tout d'y poser les mains, il faut pouvoir l'admirer.
Il dit vrai, fiston. Tu peux travailler la terre, la servir de ton mieux.  Mais ce n'est que si tu prends le temps de l'écouter, de l'aimer, qu'elle s'épanouira.

Il écoutait chanter les instruments comme il écoutait le vent dans les feuillages les soirs de l'automne. La musique était sa façon de voyager. 

Á force d'étreindre cette Terre qu'ils disent aimer, les hommes finissent par l'étouffer..

L'homme est la gangrène de la Terre. Il finira broyé par la machine qu'il a créée ..

Hermeline est un lieu où la nature vit à son rythme.  Par le mur qu'ils ont bâti autrefois, les frères ont voulu protéger quelque chose de fragile.  Ce mur n'est pas fait pour barrer, mais pour garder un espace de silence. 

Dans le monde bruyant qui se dessine, les lieux de paix et de silence se feront rares. Dans cet avenir que je ne connaîtrai pas, les sentinelles veilleront sur ces sanctuaires, les préserveront du bruit et de la folie des hommes.  (...) Quand, demain, avait-il poursuivi, les prairies auront été maçonnées, les forêts rasées, la Lune colonisée et les autels abandonnés, ces lieux seront les seuls à offrir au silence un espace où murmurer.