Virginie Despentes
Le Livre de Poche 34047
432 pages
Date de parution : 02/03/2016
EAN / ISBN: 9782253087663
Prix : 7.90 €
Qui est Vernon Subutex ?
Une légende urbaine.
Un ange déchu.
Un disparu qui ne cesse de ressurgir.
Le détenteur d'un secret.
Le dernier témoin d'un monde révolu.
L'ultime visage de notre comédie inhumaine.
Notre fantôme à tous.
Magistral et fulgurant. Une œuvre d'art. François Busnel, L'Express.
Dans cette peinture d'une France qui dégringole dans la haine et la précarité, Virginie Despentes touche au sommet de son art. Alexis Brocas, Le Magazine littéraire.
Une comédie humaine d'aujourd'hui dont Balzac pourrait bien se délecter. Pierre Vavasseur, Le Parisien
Mon avis
La vie de Vernon Subutex va changer au décès de son ami Alex Bleach, un chanteur célèbre.
En effet, c'est Alex qui l'aidait à payer son loyer depuis quelques temps. Vernon était disquaire, il a dû fermer "Revolver" son magasin suite à l'évolution du monde du disque, le commerce péréclitait.
C'est la descente aux enfers qui commence pour Vernon, il perd tout et se fait expulser. Il cherche des potes pour l'héberger avant de sombrer encore....
Il est en possession de cassettes que Bleach avait filmé chez lui et lui avait remis en lui disant que c'était son testament.
Beaucoup de personnages dans ce roman, petit à petit on comprend que le point commun est le lien de près ou de loin avec Alex Bleach et Vernon en est le fil rouge.
Avec son écriture fluide, brute, souvent crue, Despentes nous parle de l'évolution du monde du disque, du cinéma, de l'internet, des réseaux sociaux. Sexe, drogue et rock'n'roll au programme.
Beaucoup de personnages, j'avoue m'être parfois perdue dans le nombre, ne pas comprendre comment ils arrivaient là mais Valérie Despentes savait elle où nous emmener car un lien se tissait progressivement entre eux.
Une société bien décrite, le Paris branché truffé de références musicales, de la bourgeoise huppée, riche et dépressive à l'ex-vedette du porn star transgenre, à la pseudo écrivaine biographe, au scénariste, trader.... bref avec brio elle brosse les différentes couches sociologiques. Un regard acide sur les relations humaines.
Un ton vif, incisif, un franc-parler qui nous donne un récit tout simplement jubilatoire.
J'ai hâte de lire le tome deux qui vient de rejoindre ma MAL.
Ma note : 9.5/10
L'avis d'autres jurées : Anne-Laure, Isabelle, Pauline
Les jolies phrases
La vie se joue souvent en deux manches : dans un premier temps, elle t'endort en te faisant croire que tu gères, et sur la deuxième partie, quand elle te voit détendu et désarmé, elle repasse les plats et te défonce.
Mais l'amitié fait ça : on apprend à jouer sur le terrain de jeu des autres.
Internet, pour un parent, c'est comme si on te volait ton gosse avant même qu'il sache lire.
Vernon est resté bloqué au siècle dernier, quand on se donnait encore la peine de prétendre qu'être était plus important qu'avoir.
Seuls les tout petits chefs jouissent de leur pouvoir -au-dessus, on ne connaît que la peur de se faire poignarder dans le dos, la rage des trahisons et le poison des fausses promesses.
Internet est l'instrument de la délation anonyme, de la fumée sans feu et du bruit qui court sans qu'on comprenne d'où il vient.
Les choses ont changé. A notre époque, si on aimait faire chier le monde, on faisait du X, mais aujourd'hui porter le voile suffit.
Lancer un lynchage médiatique est plus facile que faire décoller un buzz positif - elle prétend qu'elle sait faire les deux, mais l'époque plébiscite la brutalité. Celui qui défonce est celui qu'on écoute - il faut toujours prendre un pseudonyme mâle pour malmener quelqu'un.
Changer, c'est toujours perdre un bloc de soi. On le sent qui se détache, après un temps d'adaptation. C'est un deuil et un soulagement en même temps.
Personne n'accepte la première gifle si elle ne vient pas accompagnée d'un flot merveilleux d'excuses, de promesses, une intensité de ne pas vouloir te perdre, de ne pas envisager de te perdre. Ceux qui peuvent te tuer sont toujours ceux qui tiennent le plus à toi. Quand elle a vraiment envie d'eux, c'est qu'elle sent qu'ils pourraient la tuer.
La peur. Il ne la connaissait pas encore. Elle venait de s'accrocher aux viscères et ne bougerait plus. La peur qu'il arrive quelque chose à cette petite créature.. Et il avait suffi d'une seconde à ce "quelque chose" pour se déployer entièrement : maladie, blessure, agression, accident, contagion, violence, torture, faim, abus, attouchement, pénétration, kidnapping, enfermement, incendie, attentat, obus, guerre, épidémie, tsunami, typhon, étouffement... "La prunelle de mes yeux." L'expression peine à rendre ce qui lie le parent à son nouveau-né. La prunelle de ses yeux, on pouvait la lui arracher sans qu'il tombe - la moelle de mes os s'approcherait davantage, pour dire que ça parcourt tout ce qu'on est, et qu'il s'agit du lien qui s'établit, avant même qu'on soit capable de reconnaître son enfant parmi les autres. Il était à peine arrivé, et déjà la terreur avait rempli Patrice.
Quand on se retrouve du côté des pestiférés, une fracture nette sépare votre monde de celui des épargnés. On ne veut ni charité, ni empathie. Au fond, on préférerait ne plus avoir aucun contact. De chaque côté des frontières, les mots n'ont plus le même sens.
Si seulement il pouvait s'éteindre, comme ça dans l'heure - il imagine la flamme d'une bougie qui vacille puis faiblit et la mèche noire, un rien rouge et puis plus rien. Mais on ne meurt pas de désespoir, en tout cas pas si facilement.
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