Les arènes
Parution : 23 janvier 2019
Pages : 160
Isbn : 97827112001157727031
Prix : 14.90 €
Présentation de l'éditeur
Traductrice de presse, Bérengère Viennot s’est trouvée confrontée à un défi inédit après l’élection de Donald Trump.
Le président américain a fait exploser les codes de la parole politique. Sa langue est vulgaire et confuse, truffée de fautes de syntaxe et de phrases sans queue ni tête, de sarcasmes et d’invectives – signes d’un rapport dévoyé à la réalité et à la culture.
D’une plume aussi désopilante qu’incisive, l’auteure raconte son casse-tête de traductrice et s’interroge. Comment glisse-t-on de la violence des mots à la violence politique ? En quoi est-ce là un symptôme de l’état de la démocratie ? Pourquoi sommes-nous tous concernés ?
La langue de Trump est un miroir implacable : du président lui-même, de l’Amérique et de notre époque.
Mon avis
Bérengère Viennot est traductrice politique et lorsque le 08/11/2016 Trump a été élu, c'est avec "la gueule de bois" qu'elle s'est réveillée. L'inimaginable était devenu réalité !
Il est clair que c'est un autre discours que celui de ses prédécesseurs ! Celui de Trump reflète l'Amérique de notre époque.
Être traducteur ne se limite pas à traduire des mots, il faut aussi tenir compte de la personnalité, de l'intention du locuteur, du contexte dans lequel il a prononcé ces mots.
Le vocabulaire de Trump est limité, 500 mots environ ! Des mots simples, du niveau de 5ème, des mots simples faciles à comprendre de tous mais difficile à traduire car s'il est évident que chacun les comprend, cela permet aussi à chacun d'en entendre ce qu'il veut !
Trump utilise le plus souvent les mots "Great(est)/win/looser/bigger/better/stronger/America great again".
L'usage de TWITTER, outil de communication est aussi perçu comme un moyen honnête de faire passer un message par de simples phrases proches de l'oralité, ce qui interpelle. C'est inédit pour un président d'utiliser ce type de média. Le moins que l'on puisse dire c'est que Trump est dans l'air du temps.
Sa syntaxe à elle seule permet de le décrypter :
- " " le cynisme
- ??? l'incrédulité
- !!! l'incrédulité extrême
- majuscule la colère
Ces petites phrases courtes martelées comme des slogans font croire sa vérité même si celle-ci est fausse. A force de le dire Trump finit par croire parfois ses propres messages.
Vocabulaire simple et limité, utilisé sciemment, faisant preuve d'un manque de culture du Président ? ou au contraire d'une stratégie, d'une certaine intelligence ?? C'est une vraie question.
On constatera aussi que certains mots ne font pas partie de son vocabulaire comme "regrets, excuses, être désolé" !
Beaucoup de choses analysées dans cet essai vraiment très intéressant, interpellant.
Un chapitre est consacré au Point Godwin et ose un parallèle avec les discours de Goebbels, l'esprit des années 30, cette simplification du langage qui divise et fait preuve d'une violence grave qui divise la société et éveille la haine de l'homme. Est-ce conscient ? N'y a-t-il pas danger que ces discours ne divisent encore plus et soit un premier pas vers une dictature ?
Trump ne lit pas ou très peu de prompteur, que cela cache-t-il ? D'autres questions posées dans ce récit très intéressant et très agréable à lire car parsemé de touches d'humour.
Ma note : 9/10
Les jolies phrases
Traduire, c'est vouloir susciter dans sa langue (car le bon traducteur travaille vers sa langue maternelle) les sensations intellectuelles et affectives que le lecteur d'origine a éprouvées.
Il est incapable de filtrer ce qu'il pense, parce qu'il n'arrive pas à adapter son comportement aux situations auxquelles il est confronté. Ce qui explique son extrême vulgarité mais aussi, sans doute, sa popularité auprès de la frange de la population américaine qui a l'impression d'être menée en bateau par une élite politique qu'elle ne comprend pas, et qui voit dans le côté "nature" des propos de Donald Trump, qui dit tout ce qu'il pense, une forme de franchise et, partant, d'honnêteté.
Dans le discours, au sens large, de Trump, candidat puis de Trump président, c'est cela aussi qui a choqué les traducteurs: tout chez lui n'est qu'oralité. Même lorsqu'il écrit, on dirait qu'il parle, qu'il est là, physiquement, et qu'il harangue les lecteurs à coups de slogans et de tweets comminatoire où se retrouve souvent en filigrane la menace de juger antipatriotiques tous ceux qui ne pensent pas comme lui.
..le langage binaire utilisé par les "grands hommes" de la dictature nazie simplifie la pensée et la rend incohérente, et c'est cette incohérence qui conduit à l'arbitraire et à l'autoritarisme.
Et finalement, cela n'a pas d'importance, car la lecture est loin d'être l'unique accès à la culture. Les techniques dont nous disposons au XXIe siècle - les livres lus, les films, les documentaires, Internet ! - permettent de compenser en très grande partie les lacunes que l'absence de lecture va créer. Et ne pas lire ne veut pas dire être incapable de penser, de réfléchir, de s'instruire et de se cultiver.
La langue de Donald Trump tourne en boucle, ses discours aussi, tout comme sa réflexion et sa pensée politique, car il ne se fie qu'à lui-même pour prendre ses décisions. Or, un autre inconvénient du refus d'apprendre, d'en savoir plus, c'est que c'est aussi l'expérience des autres qui déclenche le mécanisme de l'empathie. Il faut avoir eu l'expérience de points de vue différents pour "sortir de soi" et adapter sa pensée à d'autres fonctionnements que ceux qui nous sont familiers.
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