dimanche 11 mai 2014

Le chardonneret Donna Tartt 8/10


Plon
09 Janvier 2014
ISBN 9782259221863
650 pages
23 €



Le Chardonneret


Dix ans après le succès mondial du Petit copain, et vingt après celui du Maître des illusions, Donna Tartt fait son grand retour avec Le Chardonneret, une odyssée hantée dans l'Amérique d'aujourd'hui.

Qui est Theo ? Que lui est-il arrivé à New York pour qu'il soit aujourd'hui, quatorze ans plus tard, cloîtré dans une chambre d'hôtel à Amsterdam comme une bête traquée ? Qu'est devenu le jeune garçon de treize ans qui visitait des musées avec sa mère et menait une vie de collégien ordinaire ? D'ou vient cette toile de maître, Le Chardonneret, qu'il transporte partout avec lui ?

À la fois roman d'initiation à la Dickens et thriller éminemment moderne, fouillant les angoisses, les peurs et les vices de l'Amérique contemporaine, Le Chardonneret laisse le lecteur essoufflé, ébloui et encore une fois conquis par le talent hors du commun de Donna Tartt.

Donna TARTT



Donna Tartt est née le 23 décembre 1963 à Greenwood au Mississippi . Elle a écrit son premier poème à l'âge de 5 ans et elle avait 13 ans lorsqu'elle fut publiée pour la première fois dans une revue littéraire.

Elle a étudié au Bennington College dans le Vermont et là elle s'est liée d'amitié avec l'écrivain Bret Easton Ellis, à qui elle a dédicacé son chef-d'œuvre, Le Maître des illusions.  C'est à ce moment qu'elle a commencé à l'écrire, livre qu'elle a mis huit ans à terminer.

Ce roman fut un grand succès de librairie, étant vendu à plus de cinq millions d'exemplaires .

Dix ans après Le Maître des illusions, Donna Tartt publie son deuxième livre : Le Petit Copain.

Bien que critiqué par certains des lecteurs du premier roman, Le Petit copain reste dans le style extrêmement précis et descriptif des personnalités développées par la romancière .

Prix Pulitzer - Fiction - 2014 avec "le Chardonneret".


Mon avis

Un magnifique roman.  Une belle grosse brique d'environ 800 pages d'écriture très dense.  Il s'agit ici du troisième roman de Donna Tartt après le célèbre "Maître des illusions"en 1993, "Le petit copain" en 2003, elle empoche le "Pulitzer" en 2014 avec ce nouvel opus "le Chardonneret".

C'est par cet ouvrage que je découvre l'auteur.

Théo Decker est enfermé dans une chambre d'hôtel à Amsterdam, il nous raconte sa vie et nous plonge quatorze ans plus tôt.  

Nous sommes à New York. Il a 13 ans et est convoqué à l'école avec sa mère.  Il pleut; ils sont en avance et en profitent pour visiter une exposition de peintures "Art du portrait et nature morte : chefs d'oeuvre nordiques de l'âge d'or". 

Ils viennent voir les Rembrandt, Vermeer mais surtout le petit tableau de Carel Fabritius "Le Chardonneret"; l'art et la peinture étant régulièrement présents dans le quotidien de Théo enfant.

Ce tableau peint en 1634 par Fabritius avait échappé de justesse à une explosion dans une poudrière de Delft. Il jouera un rôle primordial dans l'existence de notre narrateur. Je ne peux m'empêcher de mettre leurs destins en parallèle.

Malheureusement un drame survient. Une bombe explose suite à un attentat terroriste et la vie de Théo bascule.  Sa maman était repartie voir un tableau dans une autre salle et meurt.  Théo, quant à lui était resté dans le musée intrigué par la présence d'une jeune fille rouge (Pippa) et d'un vieil homme (Weltie) l'accompagnant.  Weltie décède en lui disant ses dernières volontés et en lui donnant sa bague et une adresse.  Il quittera le musée avec le célèbre tableau de Carel Fabritius "le Chardonneret". 

A ce moment, il ne se doute pas que ce tableau dirigera sa vie.

Voilà le point de départ de ce gros roman fleuve.

La première partie est passionnante, je l'ai lue rapidement. Puis tout à coup, j'ai ressenti un changement de rythme, des longueurs, un peu d'ennui.

Cependant, chaque personnage décrit dans ce récit l'est d'une façon remarquable.  L'aspect psychologique de chaque personnage est décrit en profondeur.  On peut se fondre, rentrer dans la peau, dans la tête du personnage de façon remarquable.  On se surprendrait presque à réfléchir pour ou par lui.

Théo a tendance à idéaliser cette période précédant le départ précipité de sa maman. Pour lui, c'était le bon temps, tout allait bien, pourtant la réalité était tout autre.  Ils n'étaient pas très riches depuis que son père les avait quittés un an plus tôt.  A l'école non plus tout n'allait pas pour le mieux car ils étaient attendus par la direction. Nous allons voir grandir Théo, suivre son parcours initiatique, avec des hauts et des bas, des joies et des peines. Sa vie comme ses émotions évoluent un peu comme des montagnes russes.  Il découvrira la drogue, la dépendance, l'illusion de pouvoir décrocher quand il veut et d'être libre.  Ses rencontres lui feront côtoyer le meilleur comme le pire, le tirant tantôt vers le haut, tantôt vers le bas.

  • Ses amis : Andy son double; Boris autre écorché vif qui veut s'en sortir seul sans peur, sans regret.
  • Le ou les pères : la relation avec son vrai père, joueur, menteur, embobineur, alcoolique, addict ; Mr Barbour ; le formidable Hobie, son nouveau père de substitution qui lui donnera tant.
  • Les mères : la sienne idéalisée, la douleur de sa perte, le manque et le traumatisme; Xandra sa belle-mère et Mrs Barbour qui l'aimera comme un fils.
  • Les femmes : Pippa qui représente l'amour impossible, sa fiancée Kitsey..
On s'attache vraiment à chaque personnage.  Je regrette juste un peu d'en perdre certains de vue sur la fin du roman.

Les lieux : New York, Las Vegas et Amsterdam sont décrits à merveille. Cela fonctionne; on y est vraiment.  Donna Tartt décrit merveilleusement bien les ambiances et les atmosphères.

L'art, la peinture, la poésie, les meubles anciens occupent également une place centrale au coeur de l'ouvrage.  Une oeuvre d'art qui je le répète touchera Théo au plus profond de lui-même.

L'addiction est également bien décrite, que ce soit celle au jeu, à l'alcool ou à la drogue.  On visite ici tous les stades, de l'envie, de la naissance de celle-ci en passant par le fait que l'on peut en rester maître en vain, en passant bien entendu par le manque et ses conséquences.
Un récit qui explore les failles et faiblesses de l'espèce humaine également.

Cela n'a pas suffi malheureusement pour que j'y prenne un réel plaisir car le livre est dense, très dense et certains passages m'ont semblé longs, très longs.  La magie n'a pas tout à fait opéré même si mon intérêt était à chaque fois éveillé par les nouvelles nombreuses péripéties alimentant ce roman fleuve. Le côté thriller fonctionne mais malgré ses nombreuses qualités, son rythme lent et ses nombreuses longueurs ne font pas de moi une lectrice enthousiaste contrairement à d'autres avis glanés sur la blogosphère.  


Ma note un 8/10


Les jolies phrases

Les gens meurent, bien sûr, disait ma mère;  mais la façon dont nous perdons les choses alors qu'il est possible de l'éviter, c'est un vrai crève-coeur; Il faudrait que la négligence pure et simple n'existe plus ; ni les incendies et les guerres.  Dire que le Parthénon a été utilisé comme entrepôt de munitions.  Je suppose que ce que nous réussissons à préserver de l'Histoire est un miracle."

Qui aurait cru qu'il était en mon pouvoir de rendre quelqu'un aussi heureux ? Ou que je pouvais l'être autant moi-même ? Mes humeurs étaient comme un lance-pierres ; après avoir été enfermé et anesthésié des années durant, mon coeur sifflait et tournait violemment en rond comme une abeille sous un verre, tout était lumineux, vif, perturbant, faux - mais c'était une douleur propre qui contrastait avec la douleur terne qui m'avait affligé comme une dent cariée pendant des années sous l'effet des drogues, la douleur maladive et sale de quelque chose de pourri.  La clarté était exaltante ; c'était comme si j'avais enlevé une paire de lunettes tachées qui floutaient ce que je regardais.

Je ne considérais plus mon corps comme m'appartenant.  Il avait cessé d'être à moi.  Agitées, mes mains me donnaient la sensation d'être séparées de lui, de flotter de leur propre chef, et quand je me suis levé je l'ai fait comme une marionnette, me dépliant et me relevant de manière saccadée au bout de ficelles.

L'idolâtrie !  Trop se soucier des objets peut vous tuer.  Si ce n'est que, si vous vous souciez suffisamment d'une chose, elle prend vie, non ?

Si un tableau se fraie vraiment un chemin jusqu'à ton coeur et change la façon de voir, de penser et de ressentir, tu ne te dis pas "oh, j'adore cette oeuvre parce qu'elle est universelle", "j'adore cette oeuvre parce qu'elle parle à toute l'humanité". Ce n'est pas la raison qui fait aimer une oeuvre d'art.

J'ai beaucoup réfléchi à ce que Hobie m'avait dit : à propos de ces images qui touchent le coeur et le font s'épanouir comme une fleur, des images qui libèrent une beauté tellement plus vaste que l'on peut passer son existence entière à la chercher sans jamais la trouver.

Profonde douleur, que je commence tout juste à comprendre : nous ne choisissons pas notre coeur.  Nous ne pouvons pas nous forcer à vouloir ce qui est bon pour les autres.  Nous ne choisissons pas qui nous sommes.



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