lundi 27 septembre 2021

L'empreinte du silence - Didier Robert

 L'empreinte du silence   -    Didier Robert




















Editions FDeville
Parution : 7/03/21
Pages : 150
Isbn : 9782875990389
Prix : 15 €


Présentation de l'éditeur


Je savais que grand-père était mort pendant la guerre, mais j’ignorais les circonstances de son décès. La famille n'en parlait jamais. Pour l'enfant que j'étais, il était le monsieur de la photo posée sur la table de chevet de ma grand-mère. Longtemps, j'ai ignoré son prénom.

Les mots « Déportation » et « Résistance » jaillissaient parfois du silence qui entourait son destin. Très vite, la pudeur reprenait ses droits. Le silence couvre la honte, la peur, la tristesse… Jusqu'à ce que je trahisse l’omerta en flanquant tout sur la place publique.

C’est une tentative de justice. C’est l’esquisse d’un hommage. C’est peut-être même l’éclosion d’une fierté.

Mon avis

Didier Robert rend hommage à Fernand Legros, son grand-père.  Un homme qui était dans son enfance une photo sur la table de nuit de sa grand-mère...

Un homme mort pendant la guerre dont on ne parlait jamais dans la famille, entouré d'un silence lourd. Honte? Peur? 

Cela a toujours intrigué l'auteur qui sur base de quelques documents a mené l'enquête pour comprendre qui était son grand-père. 

Un bel hommage pour rendre justice à cet homme arrêté à Jambes le 12 août 1944 par la Gestapo.  Fernand Legros était résistant, père de trois enfants.  Un père arrêté et envoyé dans un camp en Belgique puis en Allemagne.  Il n'est jamais revenu.  C'est ce qui a rendu le deuil impossible.

Des mots comme "déportation" et "résistance" n'ont jamais été prononcés.

L'auteur a reconstitué bribes par bribes la vie de son ancêtre  pour comprendre la raison du silence et rendre l'existence de cet absent qui avait été vécu par ses proches comme un abandon car l'anéantissement, la réalité des camps ne se racontent pas. 

Ce qui est trop difficile à admettre et à raconter est tu comme le déni du séjour de Fernand à Neuengamme.  L'indicible ne se raconte pas, à la place il y a le silence et la douleur de l'absence. 

Vibrant hommage émouvant bien écrit.  


Ma note : 8.5/10



Les jolies phrases

Ici, tu as deux droits, le droit de te taire et celui de l'utiliser !

Grande, Seconde, celle de Trente Ans, l'enfance n'a que faire de ces détails alors qu'elle passe l'après-midi à jouer à la guerre, à mourir cent fois et à renaître autant de fois pour se lancer dans d'héroïques assauts, toutes armes confondues dans son arsenal, de l'épée au char d'assaut. 

Le but importait peu.  Seul le plaisir du récit, celui de la parole qui roule, se déroule, nage, fluctue, abonde en cascades, était l'enjeu de ces monologues que j'interrompais parfois pour demander des nouvelles de tel personnage abandonné sur la route. Une fois le pauvre hère récupéré, il repartait immédiatement vers un autre lieu et une autre aventure.  Je m'endormais ébloui, les sens nourris par des visions colorées, des bruits de forêt, des cris d'animaux, de plaintes minérales, et autant de sensations qui finissaient par avoir raison de ma capacité à demeurer éveillé. 

Ce que l'enfant ne pouvait mesurer, l'adulte pouvait le ressentir à l'aune des mots.  Je percevais avec plus de netteté et de justesse la béance laissée par la disparition d'un père. 

Les vies brisées sont de deux ordres, il y a celles qui basculent dans la maladie psychique et celles qui se poursuivent, malgré tout. 

On ne choisit pas d'être résistant, on l'est ou on ne l'est pas. 

L'intensité de certaines tragédies demande du temps pour entrer dans le champ de la réalité qu'un être peut supposer ou supporter. 

La difficulté consiste à demeurer un homme au-delà de ce que les bourreaux vous infligent. La capacité à quitter le vertige de la souffrance et de l'humiliation, de résister à la tentation de supplier, est une des conditions de la survie.




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