Pages volées - Alexandra Koszelyk
Aux forges de Vulcain
Parution : 23/08/24
Pages : 300
ISBN : 9782373058222Prix : 21 €
Présentation de l'éditeur
Quand des pages entières de votre vie vous ont été volées, comment faire pour les retrouver, si ce n’est les écrire ?
Les parents d’Alexandra meurent dans un accident de voiture alors qu’elle n’a que huit ans. Elle est recueillie avec son frère par sa tante. Tandis qu’elle grandit entre premiers amours et amitiés adolescentes, un immense vide demeure en elle. Qui est-elle ? L’orpheline ? L’Ukrainienne ? La jeune fille qui aime les histoires ?
Vingt ans plus tard, alors qu’elle revient en Normandie, elle entreprend une enquête sur ce qui a permis sa survie : la langue, la littérature et l’écriture.
Un récit poignant sur ces continents intérieurs que nous habitons et qui nous habitent.
Mon avis
C'est un récit très personnel entre l'autobiographie et l'essai.
Alexandra Koszelyk a perdu ses parents dans un accident de voiture très jeune, elle dit dans son livre "Je suis née à 8 ans 7 mois et 12 jours", jour du drame où elle se réveille seule dans un hôpital. Avant cela, oubli de tout souvenir.
Elle nous raconte sa dépossession, la difficulté de faire son deuil, ses parents étant déjà enterrés sans qu'elle puisse leur dire au revoir. Cette culpabilité, la douleur et l'absence trop difficile à vivre pour elle et son jeune frère.
Elle va découvrir le pouvoir rédempteur des mots en écoutant les chansons de Goldman puis dans les livres : Milan Kundera, Antigone, Gaudé... ces mots qui lui feront prendre conscience qu'une vie est possible malgré les deuils. Puis plus tard Joan Didion, Joyce Carol Oates, Camille de Toledo, Antoine Wauters.
Introspection, réflexion, peur de la transmission de ses peurs au moment de devenir mère, un livre encore "La mer noire " de Kéthévane Davrichewy dont une phrase résonne en elle "Ce qui compte c'est avancer sans se retourner" va être importante.
Elle est aussi en constante recherche de son identité, sur ce qui la définit, retrouver la vérité de ses origines en cherchant ses racines comme l'étymologie : la racine des mots et va commencer à écrire via son blog "Bric a book" et ensuite utiliser l'écriture pour lutter contre l'oubli.
Ecrire c'est un allégement, c'est donner du sens, naîtra "l'archiviste" , ses racines, sa langue maternelle : l'ukrainien, hommage à sa grand-mère. Lire et écrire pour oublier la mort et faire naître l'espoir.
Ce récit est touchant, écrit comme un journal, d'une justesse incroyable. L'écriture sensible, d'une grande sincérité nous emmène au coeur de l'intime. Elle parle des traumas de l'enfance, évolue de l'ombre à la lumière, fait remonter ce qui est enfoui en elle jusqu'à la libération en écrivant les pages de sa vie qui lui ont été volées.
Ma note : 9/10
Les jolies phrases
..La fiction m'aura apporté ce que je n'aurais pas pu vivre autrement.
L'image qu'on a de soi n'est pas l'image que les autres ont, mais laquelle est la plus vraie ?
L'enfant que je suis encore grandit dans un monde où l'adulte n'est pas fiable, pour une raison qui m'échappe encore. Celui-ci omet, tronque, maquille, falsifie et trahit la confiance accordée par l'enfant. Quel est cet aveuglement? Pourquoi agir comme si rien ne s'était passé ?
C'est sans doute cela, les ruptures. Un silence, puis une parole qui par la suite n'est plus jamais la même.
Et il y a de ça, dans ces chansons, une sortie de mon statut d'orpheline, qui m'apprend alors que malgré la douleur, l'absence et les deuils, une vie est possible, en dehors des cases que la vie nous impose. Et même si nous ne réussissons pas à rebondir, à nous extraire du chagrin ou de la douleur, le plus important est d'être nous-mêmes.
Les livres sont ces histoires qui me permettent de saisir que la vie est faite d'embûches dont il faut se relever.
Je porte un vêtement que personne ne voit, une chair tissée de mots dits qui se sont agglutinés au fil des générations. Á ma naissance, je n'étais donc pas nue, mais déjà enveloppée des roches compactes que je ne pouvais m'ôter. Sur les bâtiments romains est gravé le nom de leur fondateur, il en va de même pour nous, une épigraphe illisible inscrite sur notre front, et nous nous demandons comment la déchiffrer.
On fait avec, la douleur ne disparaît pas, la résilience est un concept qui permet de rassurer l'autre, de se dire que, malgré les traumatismes, la vie et la joie sont toujours possibles.
Tout l'intérêt de l'écriture réside là. Mieux se connaître soi, sans jamais arriver toutefois à se comprendre totalement, se remettre à l'écriture, à la création.
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