Ceci n'est pas un fait divers - Philippe Besson ♥♥♥♥♥
Julliard
Parution : 5 janvier 2023
Pages : 208
EAN : 9782260055372
Prix : 20 €
Présentation de l'éditeur
Ils sont frère et sœur. Quand l’histoire commence, ils ont dix-neuf et treize ans.
Cette histoire tient en quelques mots, ceux que la cadette, témoin malgré elle, prononce en tremblant : « Papa vient de tuer maman. »
Passé la sidération, ces enfants brisés vont devoir se débrouiller avec le chagrin, la colère, la culpabilité. Et remonter le cours du temps pour tenter de comprendre la redoutable mécanique qui a conduit à cet acte.
Avec pudeur et sobriété, ce roman, inspiré de faits réels, raconte, au-delà d’un sujet de société, le long combat de deux victimes invisibles pour réapprendre à vivre.
EAN : 9782260055372
Prix : 20 €
Présentation de l'éditeur
Ils sont frère et sœur. Quand l’histoire commence, ils ont dix-neuf et treize ans.
Cette histoire tient en quelques mots, ceux que la cadette, témoin malgré elle, prononce en tremblant : « Papa vient de tuer maman. »
Passé la sidération, ces enfants brisés vont devoir se débrouiller avec le chagrin, la colère, la culpabilité. Et remonter le cours du temps pour tenter de comprendre la redoutable mécanique qui a conduit à cet acte.
Avec pudeur et sobriété, ce roman, inspiré de faits réels, raconte, au-delà d’un sujet de société, le long combat de deux victimes invisibles pour réapprendre à vivre.
L'auteur
Crédit photo:
©Maxime Reychman
©Maxime Reychman
Un tango en bord de mer, sa première pièce en tant que dramaturge, a été jouée à Paris près de 200 fois en 2014 et 2015 au Théâtre du Petit Montparnasse.
Il a également multiplié les collaborations avec le milieu du cinéma et de la télévision, ayant notamment écrit le scénario de Mourir d'aimer (2009), interprété par Muriel Robin, de La Mauvaise rencontre (2010) avec Jeanne Moreau, du Raspoutine interprété par Gérard Depardieu, et de Nos retrouvailles (2012) avec Fanny Ardant et Charles Berling.
Mon avis
Ceci n'est pas un fait divers mais bien un fait de société. Le dernier roman de Philippe Besson s'inspire de faits réels et dénonce les féminicides et l'invisibilité des victimes collatérales.
L'auteur donne ici la parole aux enfants. Léa, 13 ans, contacte son grand frère âgé de 18 ans. Il a quitté la maison depuis cinq ans pour vivre sa passion : la danse.
Au téléphone, des silences et puis cette courte phrase : "Papa vient de tuer maman".
Silence, incrédulité, déni, il passe par toutes sortes d'émotions en quelques secondes. Puis il réalise que sa soeur est seule. Qu'il doit la rejoindre, la protéger. Il contacte la gendarmerie de Blanquefort, saute dans un train pour rejoindre Léa qui a tout vu. Son père est en fuite.
Mais comment est-ce arrivé ? violence, dispute, dix-sept coups de couteau... Un fait divers me direz-vous, comme l'on en entend parfois à la radio. On est horrifié puis on passe à autre chose, la vie continue pour nous mais pour les victimes ? Vous y avez déjà pensé une seconde ? C'est le sujet de ce roman.
Pour les enfants tout s'effondre, la mère n'est plus, le père d'hier est devenu un meurtrier. Il faut trouver un autre toit car la maison, scène de crime, est mise sous scellé avec tout ce qu'elle contient, c'est la perte de tout repère.
C'est l'horreur.... et ce n'est que le début.
Philippe Besson se glisse littéralement dans la tête des victimes en utilisant le "tu" et le "nous". C'est avec beaucoup de délicatesse et de pudeur qu'il raconte les traumas, les blessures profondes, minute après minute, de manière chirurgicale, il décortique tout ce qui s'est passé, ce qui est ressenti.
Le pire est l'idée que peut-être on aurait pu éviter le drame, qu'on le pressentait car l'emprise, la jalousie excessive étaient visibles, s'il y avait eu un suivi, une écoute suite à une plainte, on n'en serait pas arrivé là.
Il y avait des signes avant coureurs, leur mère était coquette avant, elle s'était laissée aller, avait perdu du poids, semblait éteinte et l'entourage n'a rien fait...
Et puis pour les victimes collatérales, il reste ce lourd sentiment de culpabilité, les remords, le poids qu'ils portent.
Á travers une histoire individuelle, c'est aussi le déni de la société qui est mis en avant. Une sacrée claque, une mise en lumière non d'un fait divers mais d'un réel problème sociétal.
Excellentissime et tellement nécessaire.
Coup de coeur.
Les jolies phrases
Les monstres aussi ont le droit d'avoir un beau sourire.
La vie continuait autour de nous. C'était formidable, c'était épouvantable !
Une femme battue, c'est moins important qu'un chien perdu ou qu'une voiture emboutie, c'est ça ?
J'aurais dû, au contraire, être émerveillé par cet enfant qui ignorait tout de la fragilité de nos vies et qui se moquait des dames alentour.
La vie continuait, autour de nous. C’était formidable, c’était épouvantable.
Les gens raffolent des faits divers, ils ralentissent sur le bord des routes lorsqu'ils parviennent à la hauteur d'une collision qui vient de se produire, ils tiennent à être aux premières loges parce que c'est un spectacle. Là, ils scrutaient les visages des enquêteurs, interprétaient chacune de leurs mimiques, attendaient de voir sortir un brancard, un cadavre. Ils se désolaient, partageaient leur effroi, mais n'auraient pour rien au monde quitté leur poste d'observation. Ce n'était pas de la compassion, en tout cas pas seulement, c'était du voyeurisme.
(Un détail, en passant : le mot « féminicide » est souligné en rouge dans le traitement de texte que j’utilise, comme le sont les mots qui n’appartiennent pas au dictionnaire. En fait, ce n’est pas un détail.)
La vie continuait, autour de nous. C’était formidable, c’était épouvantable.
Les gens raffolent des faits divers, ils ralentissent sur le bord des routes lorsqu'ils parviennent à la hauteur d'une collision qui vient de se produire, ils tiennent à être aux premières loges parce que c'est un spectacle. Là, ils scrutaient les visages des enquêteurs, interprétaient chacune de leurs mimiques, attendaient de voir sortir un brancard, un cadavre. Ils se désolaient, partageaient leur effroi, mais n'auraient pour rien au monde quitté leur poste d'observation. Ce n'était pas de la compassion, en tout cas pas seulement, c'était du voyeurisme.
(Un détail, en passant : le mot « féminicide » est souligné en rouge dans le traitement de texte que j’utilise, comme le sont les mots qui n’appartiennent pas au dictionnaire. En fait, ce n’est pas un détail.)
Je l'ai dévisagé quelquesz instants, je n'étais plus en colère, la colère s'était subitement dissipée, je venais de comprendre que, oui, en effet, plus rien ne serait pareil, que notre vie appartenait désormais au fait divers, qu'elle relevait de la police, de la justice, que nous n'avions plus notre mot à dire.
Aussitôt après, je pense au hasard des rencontres, au destin qui lance ses dés. Si ce soir-là, elle n'était pas sortie... Si cette nuit-là, il en avait repéré une autre... C'est un exercice idiot mais comment s'en empêcher ?
Nous étions donc là, tous les trois, Léa, papy et moi, impuissants, lamentables, démunis, devant le pavillon de notre enfance, soudain inacessible. Ainsi, il n'avait pas suffi que nous perdions l'être que nous aimions le plus au monde, il fallait encore qu'on nous dépouille et qu'on nous laisse à la rue. Mais soyons clairs, on ne nous confisquait pas seulement des murs, on nous confisquait notre vie, nos souvenirs, on s'emparait de ce qui avait fait notre quotidien depuis toujours, comme si l'enfance aussi devait être effacée.
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