mardi 12 juillet 2016

Le monde entier - François Bugeon

Le monde entier

François BUGEON



Rouergue
L'estive
mars 2016
176 pages
17,80 €
ISBN
978-2-8126-1031-8

Présentation de l'éditeur

« Chevalier préférait aller à son travail en Mobylette quand il faisait beau, et il portait toujours le même casque, orange, sans visière. Ce jour-là, il avait sur le dos une chemise à manches courtes que le vent de la course faisait flotter autour d’un genre de bermuda. De loin, on voyait d’abord le blanc livide de ses mollets, puis son ventre laiteux que la chemise découvrait par saccades. »
Il n’y a pas de femme dans la vie de Chevalier, pas qu’on sache en tout cas. De même qu’il n’y a pas beaucoup de tendresse entre sa mère et lui. Pourtant, il n’a jamais eu l’envie d’aller s’installer ailleurs que dans ce village où il a grandi, où il aime aller pêcher dans les étangs, avec son vieux copain Ségur. Jusqu’à ce soir d’août où son chemin a croisé une voiture renversée sur le bord de la route…
Dans ce premier roman d’une grande délicatesse, François Bugeon saisit une vie au moment où elle bascule.

Mon avis

Quelques jours qui peuvent changer une vie.

Chevalier, la quarantaine, célibataire endurci, vit seul dans un petit village de France j'imagine. Nous sommes samedi soir, il revient de l'usine où l'on avait appelé en urgence pour la maintenance d'une machine. C'est qu'il est serviable Chevalier. Il revient en mobylette, se fait dépasser par une voiture qui roule en trombe.

Quelques virages plus loin, elle est complètement retournée dans le fossé, l'accident a eu lieu. Il sauvera les trois occupants en se démettant le bras. De douleur, il tombera dans les pommes et se réveillera à l'hôpital le lendemain.

Il est porté en héros pour le sauvetage des deux occupants. Deux, mais non il y a erreur, ils étaient trois. Il manque une jeune femme mais aussi son vélomoteur, sa veste et son portefeuille.

Il rentre chez lui. Son vieil ami Ségur lui ramènera sa mobylette dans l'après-midi, mais sans sacoche, ni veste. Il l'a trouvé près des étangs Marchand, là où ils ont l'habitude de pêcher.

Le lundi matin, Ségur revient avec une jeune femme noire, Salomé. Elle est mutique. Chevalier décide qu'elle restera chez lui.

C'est ce qui va changer sa vie.

Lui Chevalier, taciturne,solitaire s'ouvrira peu à peu sur son entourage.

C'est très cinématographique, la vie passe, lentement. Il y a son ami Ségur avec qui il va à la pêche, Claudie son ancienne amoureuse, Sidonie, veuve qui tient le bistrot du village, Meune le vieux voisin, la voisine, Flavio, sa mère avec qui les relations sont froides et tendues. Des personnages vivant leur vie ordinaire dans ce petit village de Navarre.

L'écriture est toute en pudeur, en finesse. Elle nous fait ressentir la chaleur de l'été, l'atmosphère, les sentiments éprouvés par ces accidentés de la vie. Ils ont leurs secrets, leurs mystères. C'est un premier roman qui nous emmène vraiment au coeur des sentiments et des relations humaines avec une grande délicatesse.

Mon plaisir de lecture était intense. Les mots bien choisis. Un coup de coeur en puissance, tout ce que j'aime.

Coup de ♥


Les jolies phrases

Pour lui, le café était comme une cuisine à l'échelle du village dans laquelle on pouvait se retrouver pour parler de rien et se tenir au chaud, comme une famille avant le souper.

Le jardin et Chevalier c'était la même chose, personne n'aurait eu l'idée d'imaginer l'un sans l'autre.

Ce n'était pas la couleur de sa peau, son histoire, son âge ou son milieu qui la rendaient différente à leurs yeux, mais sa façon d'être et de penser.

Il pensa que ces femmes-là étaient comme des pierres au bord du chemin, que l'on pousse sur le côté pour qu'elles ne blessent pas les marcheurs.

Il disait que c'est se reposer et se reposer c'est comme prendre son souffle, on en a besoin, c'est utile.

Comme si le fait de ne pas être riche ni cultivé signifiait que l'on possédait une morale plus complaisante, une sensibilité moindre.

Elle lui expliqua qu'il valait mieux le laisser en paix, qu'on ne veut pas voir grand monde de son vivant quand on a voulu ne plus voir personne dans la mort.

En réalité, c'était le besoin de comprendre, l'urgence de savoir ce qui avait transformé à ce point son ancien amoureux, qui l'avait conduite jusqu'au jardin malgré sa peine.

Claudie lui répondit que ce n'était pas étonnant, que c'est comme ça les vieux gars, que ça ne parle jamais de ce qui leur tient à coeur.

Aucun commentaire: