dimanche 17 juillet 2016

L'orangeraie - Larry Tremblay ♥♥♥♥♥

L'orangeraie  

Larry Tremblay

L'orangeraie - Larry Tremblay - Folio


Folio 6139
Parution : 19-05-2016
160 pages
108 x 178 mm
ISBN : 9782070469260
Prix : 5.90 €

Présentation de l'éditeur

Les jumeaux Amed et Aziz auraient pu vivre paisiblement à l’ombre des orangers. Mais un obus traverse le ciel, tuant leurs grands-parents. La guerre s’empare de leur enfance. Un des chefs de la région vient demander à leur père de sacrifier un de ses fils pour le bien de la communauté. Comment faire ce choix impossible?
Conte moral, fable politique, L’orangeraie maintient la tension jusqu’au bout. Un texte à la fois actuel et hors du temps qui possède la force brute des grandes tragédies.

Mon avis

Amed et Azis sont jumeaux, ils ont neuf ans et vivent dans l'orangeraie plantée par leur grand-père Mounir.  Ils auraient pu y vivre heureux à l'ombre des orangers si la guerre n'avait pas été présente.

Azis est malade, son père Zahed l'emmène en ville à l'hôpital mais les nouvelles sont mauvaises; il a un cancer et n'a aucune chance de survie.

Amed, lui entend des voix dans sa tête, il en a parlé à sa grand-mère.

Tamara, la maman a une soeur Dalimah qui a migré aux Etats-Unis. Elle aimerait faire venir sa soeur et ses neveux mais c'est hors de question, Zahed ne veut pas qu'on en parle car elle a épousé un ennemi, un traître.

Un matin, c'est l'horreur, la guerre les a rattrapés, la maison des grands-parents est réduite en cendres, une bombe.  Zahed enterre ce qui reste de ses parents.

Quelques jours passent et une jeep s'arrête devant la maison, c'est celle de Soulayed , un des chefs de la région.  Il va demander l'impossible à Zahed : le sacrifice d'un de ses fils pour la communauté, un martyr.

L'occasion d'accéder au Paradis par la grande porte en donnant sa vie pour la bonne cause.  Quel dilemme pour un père.  Peut-on sacrifier une vie ?  quelle drôle de question .  Azis et Amed quittent très rapidement le monde de l'enfance pour cette triste réalité.

Tamara ne supporte pas l'idée de perdre ses deux fils.  Azis est condamné et le choix de Zahed ne lui convient pas.  Elle influera sur son fils afin qu'ils échangent leur rôle.

Comment imaginer une seule seconde la situation ?  Comment comprendre et juger la guerre, les sacrifices demandés au nom de la religion, du devoir ?  Si nous y étions confrontés, quels seraient nos choix ?  Comment réagirions-nous ?   ce sont ces questions que l'on se pose à la lecture.  Envoyer des enfants au nom de la religion, être fier d'en faire des martyrs alors qu'ils continuent à subir sur place.

J'ai lu ce court roman avec mon regard de mère, le coeur serré, les yeux embués pensant aux parents qui n'avaient pas ou peu d'alternatives.

Larry Tremblay nous tient en haleine jusqu'au bout avec un coup de théâtre magistral.  Sa plume est à la fois directe et poétique et sensible pour nous dénoncer cette violence.  

Il n'y a que la littérature qui peut à ce point nous faire vivre poésie et cruauté, humanité et violence de la guerre. C'est aussi un récit sur la peur, le courage, la lâcheté.

Un livre qui dérange, qui pose questionnement, réflexions et qui malgré tout nous suggère un air de paix.  C'est tellement actuel, cela fait froid dans le dos, cette manipulation avec l'espoir d'une cause juste permettant l'accès au Paradis.

Merci aux Julie's de m'avoir intégré dans cette belle lecture commune.

Ma note : 9.5/10


Les jolies phrases

La nuit des temps, maman m'a raconté, c'est la première nuit du monde. Il faisait si noir que le premier rayon de soleil qui a percé la nuit a hurlé de douleur.
C'est plutôt la nuit qui a dû hurler, c'est elle qui a été transpercée.

Ecoute-moi, j'ai deux fils.  L'un est la main, l'autre le poing.  L'un prend, l'autre donne.  Un jour, c'est l'un, un jour, c'est l'autre.  Je T'en supplie, ne me prends pas les deux.

Et vous êtes partis à sa recherche comme si c'était la chose la plus précieuse au monde.  Du papier et du vent ! J'imagine qu'il devait être fabuleux, votre cerf-volant. ....  C'est notre grand-père Mounir qui l'avait fabriqué.

Le parfum des fleurs est leur sang, lui avait dit un jour Shalina.  Les fleurs sont courageuses et généreuses.  Elles répandent leur sang sans se soucier de leur vie.  Voilà pourquoi elles se fanent si vite, épuisées d'avoir offert leur beauté à qui veut bien la voir.

A quoi ça sert de mettre au monde des enfants si c'est pour les sacrifier comme de pauvres bêtes qu'on envoie à l'abattoir !

La neige tombait toujours et enrobait le récit d'Azis d'une couche de protection, l'éloignant dans l'espace et le temps, lui donnant la texture d'un rêve fragile sur le point de s'évanouir.

Les mots de Soulayed explosaient dans l'air comme des petites bombes fragiles qui laissaient derrière elles des traînées de silence.

La récolte réjouit l'espoir, l'espoir repose sur le regard qui ne craint pas de voir la vérité.

Le regard est comme l'oiseau, il a besoin d'ailes pour se maintenir en vol.  Autrement, il tombe au sol, a continué Soulayed.  Jamais nous ne devons baisser les yeux devant l'ennemi. Jamais. Notre haine et notre courage sont les ailes qui portent notre regard au-delà de la montagne, au delà du mensonge dont se nourrissent les chiens.  Kamal et Zahed l'ont compris.  Et leurs fils aussi l'ont compris.

C'est bien que dans notre existence quelque chose arrive parfois à nous secouer, à nous sortir de nos banalités.


C'est une LC en trio.

Voici l'avis des copines :

Brigitte : 

Petit bijou vite lu,longtemps dans les mémoires. ....Trop d'actualité ! !!
M'a tout à fait séduite.
Je recommande!

Julie (il arrive)


et mon binôme Julie des Petites Lectures de Scarlett, c'est ici 





2 commentaires:

Anonyme a dit…

Tu as parfaitement décrit mon ressenti <3
Un texte qui poursuit et qui poursuivra encore longtemps ...

enna a dit…

ça doit être vraiment fort! Je le note!