Louis veut partir David Fortemps ♥♥♥♥♥
Robert Laffont
Parution : 20/08/2020
Pages : 198
Isbn : 9782221247006
Prix : 18 €
Présentation de l'éditeur
La neige recouvre tout mais pas les images. Pascal voudrait s’ouvrir la tête pour les prendre à mains nues et les jeter dans la Semoy, qu’elles s’enfoncent dans la vase, dans les algues vertes et gelées de la rivière. Il se dit que c’est peut-être ça que Louis a cherché à faire. Il a cherché à tout éteindre. À faire un noir. À fuir.
Pascal, ouvrier dans une petite ville des Ardennes françaises, a toujours été fier de son fils Louis, un garçon calme et bon élève qui passe son temps dans les livres. Une passion presque obsessionnelle pour la littérature qui surprend dans leur entourage modeste. Tous deux mènent une vie tranquille, faite de silences complices. C’est du moins ce que pense Pascal jusqu’à ce que Louis soit retrouvé mort à la confluence de la Meuse et de la Semoy, où il a décidé de mettre fin à ses jours. Pourquoi un tel geste ? Que s’est-il passé ? Abasourdi et accablé, Pascal va peu à peu découvrir la vérité. Et bientôt, une évidence : son fils était pour lui un parfait inconnu.
Premier roman incisif et sensible, Louis veut partir dissèque une relation manquée entre un père et son fils. Il fait saillir l’absence tragique de communication au sein d’une famille et le caractère implacable du déterminisme social.
L'auteur
©Astrid di Crollalanza
David Fortems a vingt-quatre ans. Issu d’un quartier populaire de la banlieue parisienne, originaire des Ardennes, diplômé de l’École normale supérieure, il vit et travaille à Paris. Louis veut partir est son premier roman.
Mon avis
C'est un magnifique premier roman que nous propose David Fortems, 24 ans, originaire des Ardennes. Notez son nom, une plume à suivre !
Louis venait d'avoir 18 ans en janvier, un anniversaire fêté avec un gâteau et un livre. Aujourd'hui, Louis n'est plus, il a décidé de partir, on l'a retrouvé au bord de la Semoy, des médicaments dans les mains.
Louis vivait avec son père Pascal, ouvrier d'usine dans les Ardennes Françaises, un père dévasté qui veut comprendre. Il aimait son fils c'est certain, mais il l'aimait mal ! Il ne lui a jamais dit ! La communication était quasi inexistante entre eux.
Louis était là, plongé dans ses livres. Tout avait l'air d'aller bien en apparence, sa présence le réconfortait. Louis passait des heures à dévorer des histoires qui n'existaient pas, il était super bon élève, un élève brillant , lui le fils d'ouvrier cotoyait des enfants de bourgeois, il avait de l'ambition.
Rien ne laissait présager de son acte.
Pascal est désarmé, il a fait de son mieux pour élever son fils seul. Il travaille à l'usine. Dévasté, il veut comprendre, son fils était parti une semaine à Noël chez une amie. Il va le contacter et essayer de comprendre, de découvrir la vérité.
De fil en aiguille, chaque chapitre résume une rencontre, dévoile peu à peu la vraie vie de Louis.
Pascal se rend compte qu'il ne connaissait pas du tout son fils. Il va au gré des rencontres découvrir la vie secrète de Louis; ses espoirs, ses attentes, ses amours.
Louis avec lui si calme, solitaire, renfermé dans ses livres étaient à l'extérieur solaire, drôle, avait des ambitions, des espoirs et des secrets.
L'action se déroule dans les Ardennes au bord de la Semoy, un personnage à part entière.
La plume est très belle, sensible, incisive, crue parfois et à d'autres moments elle est pudique. Une écriture juste, sincère et poétique. Le style est parfait, la construction aussi qui chapitre après chapitre nous fait découvrir la personnalité de Louis et l'Amour de ce père qui a toutes les raisons d'être fier de ce fils qu'il ne connaissait pas.
Les thèmes abordés sont entre autres les relations père-fils, l'absence de communication familiale, l'écart des classes sociales et son déterminisme, la culpabilité.
Quelle claque ! Une plume à suivre c'est certain.
Magnifique premier roman.
C'est un coup de coeur ♥♥♥♥♥
Les jolies phrases
Comment survivre à un enfant qui a choisi de perdre sa propre vie.
Louis me disait toujours : Inès, on ne tombe jamais amoureux de quelqu'un, mais de quelque chose chez quelqu'un. (...) Après, quand tu tombes vraiment amoureux de quelqu'un, c'est que tout te bouleverse.
Le premier regard, c'est un tremblement de terre. Tout à coup, t'es confronté à un truc trop grand pour toi, à quelqu'un qui te plaît beaucoup trop pour que tu arrives à te donner une contenance. Un truc qui te dépasse. À ce moment-là, le bouleversement, c'est de contempler les ruines de ce à quoi tu croyais avant, ce que tu pensais stable. Tu regardes tes fondations qui s'écroulent. L'aventure à suivre, dans le meilleur des cas où l'amour que tu portes à la personne est réciproque, entendons-nous, c'est qu'il faut tout reconstruire.
Louis avait peur de se noyer dans son futur, de ne pas savoir comment éviter de couler.
Tout deuil est une éclipse. Alors que luit le soleil, soudain, une lune noire vient obscurcir le jour. L'éclipse, en elle-même, ne dure qu'un temps, mais assez pour faire lever la tête vers le ciel.
Sa simple présence suffisait ; jamais plus il ne la sentira. Une présence calme, certes, constamment plongée dans un livre, mais une présence quand même. Des mouvements, des bruits.
Être un homme, ça n'a rien à voir avec la peur, avec le courage ; c'est savoir être juste.
On préfère faire la guerre, se taper dessus, envoyer des millions d'hommes se faire buter, on préfère sacrifier la jeunesse d'un pays, tout ça pour ne pas avoir à discuter, parce qu'il n'y a pas d'honneur ni démonstration de force dans le dialogue.
Un jour Louis lui avait dit : je lis comme tu marches. Lire longtemps, marcher longtemps, c'est la même chose : le coeur bat différemment.
Il y a quelque chose de saisissant dans le fait d'admirer la neige vierge, d'être le premier à la fouler. Ce qui rend la neige belle par-dessus tout, c'est le fait qu'elle appartienne à tout le monde, au même titre que l'air qu'on respire. Pascal y réfléchit un peu. Il se souvient d'un reportage montrant le premier restaurant, dans une Chine polluée, qui faisait payer l'air propre. Un jour, on finira par penser que l'air qu'on respire ne nous appartient pas.
Cette fois-là, il s'était rendu compte qu'on existe en double, qu'on a une première existence à soi, et une seconde qui appartient aux autres, à leur perception, leur opinion, leur avis.
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