Haute-Folie - Antoine Wauters ♥♥♥♥♥
Gallimard
Parution : 21/08/25
Pages : 172
Isbn : 9782073101556
Prix : 19 €
Présentation de l'éditeur
Haute-Folie raconte la vie de Josef, un homme dont la famille a été frappée, alors qu’il venait de naître, par une série de drames qui ne lui ont jamais été rapportés. Peut-on être en paix en ignorant tout de sa lignée ? Où chercher la sagesse quand un feu intérieur nous dévore ? Qu’est-ce que la folie, sinon le pays des souffrances qui n’ont nulle part où aller ?
Servi par un style fulgurant, ce roman cruel et lumineux explore la marginalité et les malédictions qui touchent ceux dont l’histoire est ensevelie sous le silence.
Antoine Wauters
Les débuts d’Antoine Wauters
Philosophe de formation, Antoine Wauters se prédestinait à une carrière d’enseignant. Mais au fil des années, l’auteur se consacre de plus en plus à la littérature en publiant ses premiers recueils de poésie à partir de 2008 (Os, Debout sur la langue). Dans son premier roman intitulé Nos Mères, l’auteur s’intéresse à la guerre au Moyen-Orient. L'histoire est celle d’un jeune garçon qui s’invente une fratrie imaginaire pour oublier la mort de son père, pour tenir le coup pendant la guerre. La brutalité humaine semble être une constante chez l’auteur. En 2018, Antoine Wauters sort deux ouvrages en même temps : Pense aux pierres sous tes pas se passe durant la dictature et Moi, Marthe et les autres se passe dans un Paris post-apocalyptique.
Les premiers succès d’Antoine Wauters
Antoine Waters a beaucoup voyagé au Liban. Il croise également le chemin de nombreux poètes Syriens qui se sont installés en France. En 2021, l’auteur s’inspire de ces rencontres en publiant un roman en vers libres, Mahmoud ou la montée des eaux dans lequel nous suivons l’histoire d’un vieux poète, autrefois enseignant, vivant sous le régime de Bachar Al-Assad en Syrie. L’ouvrage est récompensé par le prix Wepler.
Également intéressé par le cinéma, Antoine Wauters a été scénariste pour Préjudice (2015) d’Antoine Cuypers avec Nathalie Baye au casting. source : Fnac
Photo F. Mantovani © Gallimard
Mon avis
Attention pépite! C'est un immense coup de cœur, ce sera je pense un des incontournables de cette rentrée littéraire. Antoine Wauters monte encore en puissance dans son écriture, une langue épurée qui va à l'essentiel, un récit qui m'a chaviré le cœur, bouleversée à plusieurs reprises, d'une intensité émotionnelle extrême.
Haute-Folie c'est un lieu, une ferme, un endroit frappé par une multitude de drames, ce sont les racines de Josef dont on va découvrir l'histoire. Un incendie à sa naissance, un événement qui va le consumer toute sa vie durant car "Ce qui tue c'est le secret." Il y a des choses enfouies en lui qui le dévorent, un pays de souffrance, de mal être, c'est plus fort que lui, c'est en lui, il veut comprendre savoir, se construire.
Mais comment être au monde lorsque le poids des secrets l'empêche de posséder ses racines. Josef a du mal à trouver sa place auprès des humains, il erre, fuit, marche dans la nature, se ressource dans l'écriture salvatrice. Seuls les contacts avec la nature et les enfants le rendent un peu vivant.
Il est toujours partagé entre l'envie d'être heureux, d'aimer, de trouver sa place mais quelque chose en lui le retient, des fantômes rôdent, l'habitent, le hantent. C'est plus fort que lui, les non-dits, ce silence qui tue. Et le jour où il découvre enfin son histoire, sa vie est coupée en deux, il sait qu'il va devoir lutter contre la folie et qu'il ignore complètement qui il est !
Une vie d'errances, de doutes, un destin qui s'acharne, le passé qui inconsciemment l'habite et conditionne sa vie.
Ce texte est juste sublime. La plume est incandescente, poétique, la prose est fluide. C'est un livre qui peut se dévorer d'une traite ou comme je l'ai fait, en prenant le temps pour le faire durer encore et profiter de la beauté du texte, de prendre la mesure, le poids des mots, tout son sens. Les émotions sont fortes, intenses.
Un livre court mais très dense d'une beauté extrême. C'est sombre et lumineux à la fois, bouleversant.
Il pose question sur le poids des secrets sur une vie, la folie, sommes-nous maîtres de notre destin? Le pardon est-il toujours possible ? Difficile d'être déchiré entre l'amour et la haine, la transmission et l'écriture salvatrice.
A lire absolument !
Immense coup de cœur ♥♥♥♥♥
Les jolies phrases
Peut-on être, en même temps, mort et vivant ?
Le cerveau est une planche, alors, et le savoir un long clou. C'est le maître qui dit ça. Apprendre égale souffrir. Souffrir veut dire apprendre.
On ne guérit pas de certains manques. On part parce que la brûlure est trop vive. On se met en marche parce qu'on espère rejoindre ce qui est impossible.
Le passé est une chose longue et lente à guérir. On le croit derrière nous alors qu'il est devant, qu'il nous mène et nous guide. C'est un cercle. Une boucle.
Tout a lieu dans des corps différents, mais l(histoire se rejoue, c'est la même.
L'invisible a des yeux qui n'ont d'yeux que pour moi. Rien n'est plus présent en moi que l'absence.
Le monde grouille de présences invisibles. Des minimondes cachés qui nous observent quand nous croyons tout voir et tout savoir. Cette idée me réjouit : nous ne sommes pas tout.
Le fait que j'existe plus fort intérieurement, voilà ce qui ne me rend pas heureux. Il faudrait me trouver un lieu habitable à l'extérieur aussi. Mais moi, tandis que je suis, où suis-je ?
Le bonheur existe, mais on n'infléchit pas le destin, ou alors lentement, génération après génération. On croit que des trajectoires dévient, mais la vérité c'est que là où on s'imagine qu'elles dévient, elles épousent au contraire un tracé là depuis toujours. On ne change pas ce qu'on est. On ne devient ni plus heureux ni plus malheureux. On plonge dans ce qu'on a à être.
Tout au fond de moi, il y a une gare. Et le quai de cette gare est plongé dans la nuit. Et un petit garçon, qui n'est pas moi et qui est moi, attend éternellement sur ce quai de gare un train qui ne passera jamais.
La folie ? C'est le pays des souffrances qui n'ont plus nulle part où aller.
Mon bonheur est dans la distance. Trop près de ceux qu'on aime, on les détruit.
La guerre, ce sont des enfants qui continuent de jouer, qui ne s'arrêtent jamais de jouer. Ni de sourire, ni d'espérer. Même quand partent les pères et qu'ils ne reviennent pas.
...j'ai pensé que ce qui est sous nos yeux est parfois le plus éloigné, quand ce qui est le plus éloigné, le plus caché, le plus secret, est souvent le plus proche.
Être orphelin, c'est l'être à jamais. Toute une vie mangée par le manque.
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