lundi 4 avril 2022

Un père à soi - Armel Job ♥♥♥♥♥

 Un père à soi     -   Armel Job   ♥♥♥♥♥























Robert Laffont
Parution : 10 février 2022
Pages : 306
EAN : 9782221259580
Prix : 20 €


Présentation de l'éditeur

Dans quel engrenage sommes-nous entraînés lorsque les circonstances de la vie nous poussent à modifier des faits trop têtus ? Un père à soi explore avec une virtuosité époustouflante les effets, parfois terribles, de nos arrangements avec la réalité.

Une belle complicité, une entreprise paysagiste prospère, deux grands enfants à l’université : tout sourit à Alban et Lydie Jessel. Jusqu’à ce coup de téléphone d’une jeune inconnue, un soir, alors qu’Alban ferme son bureau. Sans en parler à son épouse, à qui il dit pourtant tout, Alban accepte de rencontrer la jeune femme. Elle lui explique avoir accompagné les derniers jours d’une certaine Michelle. Et exécuter sa dernière volonté : Michelle voulait qu’Alban sache, après sa mort, que sa vie durant elle n’avait jamais aimé que lui…

Qu’est-ce que c’est que cette histoire ? Alban n’a aucun souvenir de la moindre Michelle. Quoique… Peu à peu, presque malgré lui, il se remémore ce bref épisode amoureux de sa jeunesse qu’il pensait avoir oublié, et dont les conséquences sur sa vie, la vie de sa famille et celle de son étrange messagère vont remettre en question tout ce qu’il a, croyait-il, construit de plus solide.

« La dissection au scalpel de l’humain, dans ses complexités et ses paradoxes. » La Croix

L'auteur





Armel Job est l’auteur d’une dizaine de romans parmi lesquels La Femme manquée (prix René-Fallet du premier roman), Helena Vannek (Prix des lycéens-Belgique), Les Fausses Innocences (Prix du jury Jean-Giono), Tu ne jugeras point (Prix des lycéens-Belgique et prix Simenon), Loin des mosquées, Dans la gueule de la bête, Et je serai toujours avec toi, et En son absence, tous publiés chez Robert Laffont.

Mon avis

Alban Jessel a le profil de l'homme heureux.  Marié à Lydie depuis plus de vingt ans, deux enfants, Sarah et Axel, une entreprise paysagiste prospère.  Tout semble lui sourire jusqu'à un coup de fil étrange un vendredi soir, juste avant la fermeture de l'entreprise.

Une jeune femme,Virginie, veut le rencontrer, c'est privé lui dit-elle. Cela concerne une certaine Michelle Nihoul !
Intrigué Alban accepte.  Le nom de cette femme ne lui dit rien et sans savoir pourquoi, il tait ce fait et ne dit rien à son épouse.  Il lui prétend qu'il s'agit d'une future cliente.

Mais pourquoi agit-il ainsi alors qu'il partage tout avec Lydie !  L'être humain est parfois étrange...

Ce coup de fil va faire basculer son existence, lui faire prendre un autre chemin.  Alban est pourtant un homme sans histoire, mais quoi qu'il fasse, impossible de remonter en arrière sans dommage, c'est étrange la vie!

La jeune fille lui transmet un message de Michelle décédée d'un cancer, celle-ci voulait qu'il sache qu'elle n'a aimé que lui toute sa vie ... Pourquoi cette révélation ?  Mais qui est cette Michelle ?  Il se remémore alors un bref amour de jeunesse qu'il pensait avoir oublié et qui va modifier le cours de sa vie.

Avec beaucoup de finesse et une écriture riche, Armel Job nous emmène aux tréfonds de l'âme humaine.  Il nous parle de nos failles, de nos réactions parfois intuitives qui peuvent changer le cours d'une vie.  On réagit souvent sans penser aux conséquences et revenir en arrière, essayer de réparer amène parfois plus de dégâts encore.

Alban et Virginie nous racontent leur histoire, ils se confessent à nous, s'expliquent, donnent leur point de vue, leurs raisons, ils aménagent leur vérité.

Ce roman nous parle des "mensonges" ou plus exactement "des faux-semblants" , des "non-dits", de l'envie de réparation, de ses conséquences sur la vie.

Armel Job a le pouvoir dès les premières lignes de capter notre attention, c'est un fabuleux raconteur d'histoire, impossible de lâcher ce roman.  C'est une ambiance un peu à la Simenon dans l'introspection des personnages.

Cerise sur le gâteau, cela se passe à Liège, à la Batte, son marché dominical, on retrouve comme toujours son pays la Belgique en trame de fond avec des références à nos bons produits le chocolat "Galler", la "Lupullus".  Il agrémente son récit de l'une ou l'autre expression wallonne marquant ainsi sa Belgitude.

C'est très réaliste, la vie quoi !

Ma note : gros coup de ♥



Les jolies phrases

La mort du couple, tout le monde le sait, c'est le silence. 

Le travail des mains, c'est le seul vrai travail.

On change souvent dans une vie et, le plus souvent, pas vraiment pour un mieux.  L'âme se déglingue autant que le corps.

Forcément on s'interroge sur le chemin qu'on a laissé derrière soi.

Les gens remarquables, en effet, ont à coeur de ne pas se faire remarquer.

C'est bête l'amour, quand il se présente tout seul, on n'en veut pas.  Faut attendre que ceux qui nous aimaient soient de l'autre côté pour qu'on comprenne.

Mais ne t'enterre pas dans le passé, ça ne sert à rien.  Il faut aller de l'avant, on n'a pas le choix.  

Il ne s'agit pas de leur mentir.  Tu n'en parles pas, c'est tout.  On a tous des choses que l'on garde pour soi.

On croit avoir bâti une relation sur le roc, que rien ne pourra l'ébranler.  Faut-il qu'on soit aveugle !  Il suffit d'une secousse pour que la belle construction se lézarde et peut-être qu'elle s'écroule.

Mais le véritable amour, c'est quand tu es prêt à tout lâcher, à tout bazarder pour la personne que tu aimes.  Le reste, c'est ... comment dire ... une sorte de plagiat.

Mais le respect de soi est-il suffisant ?  Peut-on vivre sans celui des autres?


Lorsque nous rentrons d'une balade en forêt, nous avons sans le savoir dérangé et écrasé des centaines de vies minuscules sous les feuilles du sentier.  Dans la vie, c'est pareil.  Ce que retrouvent nos traces, nous l'ignorons.  Le jour où, par hasard, un dégât nous revient que nous avons provoqué, nous sommes tentés de rebrousser chemin pour réparer.  Le problème, c'est que marcher vers l'arrière cause autant de dommages que de marcher vers l'avant. 

Virginie faisait partie des gens qui déclinent leur métier comme on avoue une faute.  Les étiquettes pédantes genre "technicienne de surface", "hôtesse de caisse" dont on affuble leur travail, au lieu de les relever, ne font que les abaisser plus encore, puisqu'il semble honteux de désigner leur tâche par son nom. 

Avant Carol, j'étais comme un chicon en somme, une racine à laquelle on avait coupé les feuilles.  Carol m'avait pris en main, elle m'avait apprêté pour une nouvelle vie, puis elle m'avait quitté, comme on laisse le chicon sous la bâche.  Un bourgeon cependant pousse dans l'obscurité, il lève, il est bientôt prêt.  Lydie avait soulevé la bâche.  Elle n'avait plus qu'à me cueillir. 

Quand on ment, on se croit toujours obligé d'ajouter des explications pour faire vrai, dont le résultat le plus sûr est de faire faux.

Nous restions au bord de l'amour, comme des baigneurs frileux assis sur la berge, les pieds nus dans le courant, qui s'éclaboussent en riant, mais qui ne se résolvent pas à se lancer dans la rivière. 

Ceux qui se sentent condamnés ne peuvent plus penser à l'avenir, ils vivent seulement dans le passé qui va bientôt les engloutir. 

L'amour est un sentiment à la fois le plus altruiste et le plus égoïste qui soit.  On se saignerait pour l'être aimé, mais pas question qu'un intrus s'avise de l'aimer lui aussi. 

Quand les enfants deviennent adultes, on dirait que le temps tue l'être délicat qu'ils ont été, qui nous procurait tant de joie.  A la place, il ne reste que des étrangers.

Le mensonge est un engrenage. Il y va posément, de concession en concession.  Aucune n'est décisive. Cependant les cliquets s'abattent sur la roue crantée.  Impossible de revenir en arrière.
Ou, si l'on veut, c'est comme si le vrai et le faux étaient sur une balance.  Au début, le plateau du faux est vide.  On n'y place d'abord que d'insignifiants ingrédients, qui ne font pas le poids.  Jusqu'au jour où un dernier, minuscule pourtant, fait basculer le plateau de la vérité.  J'ai lu que la pièce à laquelle sont suspendues les plateaux s'appelle le fléau.  C'est bien trouvé. 

Avoir un secret, me disait-elle, c'est le bien le plus précieux que tu puisses posséder.  C'est comme si tu avais un trésor en toi, que personne ne saurait t'enlever.  Quand tu n'es pas bien, tu peux toujours y penser, il te console.  Tu as un soleil dans ton âme.  

Un enfant qui s'interpose entre ses parents quand ils ont un différend sait très bien qu'il met la main entre l'écorce et l'arbre.  Ça peut lui faire plus mal à lui qu'à eux.

La mort est facile, l'existence est difficile.

La vie des morts ne leur appartient plus, elle appartient aux vivants.

Notre amour avait perdu des plumes, mais ce plumage était-il autre chose que la parure du couple idéal, qui s'imagine au-dessus du lot commun fait de hauts et de bas.

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4 commentaires:

¨Philippe D a dit…

Je viens de le recevoir pour mon anniversaire. J'aime bien Armel. J'aimerai sûrement celui-ci...

eimelle a dit…

il est dans mes prévissions de lecture pour de mois belge!

Anne Des mots et des notes a dit…

Un auteur belge incontournable !

nathalie vanhauwaert a dit…

@eimelle Bonne lecture à toi
@anne comme tu dis, un incontournable , jamais déçue !